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« Ass hole » ou « bad cop » ? Les Etats sangsues qui jouent les convives frugaux

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 26 juil. 2020
  • 3 min de lecture

On connaît bien le cas de l’Irlande qui a assuré son décollage économique grace à un dumping fiscal. La tolérance était admise car il s’agissait de permettre à un Etat membre de rattraper son retard. Elle avait sa limite de bienséance que la Commission s’emploie désormais à rappeler. Sans toujours être entendue, car la Cour de Justice européenne vient de légaliser une annulation d’impôt irlandais au bénéfice d’une multinationale américaine. Étrange appellation qui désigne un géant commercial qui est autorisé à exploiter partout et ne payer ses impôts quand il veut, le plus souvent nulle part. Un fortifiant qui n’est pas pour rien dans sa croissance exponentielle.


Bien différent est le cas des Pays-Bas. Depuis des décennies, cet Etat dont 50 % du PIB vient de l’international pratique un dumping fiscal et juridique pour attirer les sièges d’entreprises européennes ainsi que leurs filiales financières. Une manière de siphonner les ressources fiscales des autres Etats, sans effort. En effet, nul besoin d’usines, d’infrastructures, de formation du personnel, il suffit de faire des rabais aux grands groupes pour remplir le tiroir caisse. Les sangsues ne se comportent pas autrement.


Qu’on en juge. La Hollande a un régime fiscal très favorable aux investisseurs, elle propose de nombreuses exonérations de taxes et mesures d'incitation à certains types d'entreprises souhaitant s'étendre en Europe. Quelques-uns de ces avantages :

  • Une centaine de conventions fiscales bilatérales permettant d'éviter la double taxation.

  • Un taux d'imposition de 20 % sur les 200 000 premiers € de bénéfices et de 25 % au-delà.

  • Une exonération à 100% des dividendes et plus-values éligibles.

  • Une retenue à la source réduite ou nulle sur les dividendes et versements d'intérêts et de redevances.

  • Une fiscalité avantageuse pour les expatriés : avantage fiscal de 30% sur l'impôt sur les revenus pour la main-d'œuvre étrangère spécialisée et qualifiée.

  • Les sociétés de recherche et développement peuvent bénéficier de “l'innovation box” qui ramène à 5 % le taux applicable pour l'impôt sur les sociétés, ainsi que d'un crédit d'impôt (WBSO) donnant droit à des réductions sur les charges salariales et cotisations sociales, plus une allocation pour frais de R&D (RDA).

  • La non-imposition de 30 % des expatriés disposant d'une expertise spécifique rare sur le marché du travail néerlandais.

  • Tous les avantages liés à l'actionnariat sont exemptés de l'impôt néerlandais sur les sociétés, et bénéficient du régime d'intégration fiscale qui permet de compenser les bénéfices et les pertes des membres d'un groupe de sociétés.


Les bornes de la décence sont franchies quand nos amis néerlandais se posent en donneurs de leçons de frugalité et prétendent disposer d’un droit de veto sur les politiques de relance des autres membres de l’Union. Quand dans un club un individu se comporte ainsi on l’appelle selon un concept développé par le philosophe américain James Aaron : un “Asshole”.


Selon lui, un "asshole allows himself to enjoy special advantages in social relations out of an entrenched sense of entitlement that immunizes him against the complaints of other people". Le asshole, en français “trou-du-c*”, est celui qui s’accorde la jouissance d’avantages spéciaux dans les relations sociales, retranché derrière un sens de la légitimité qui l’immunise contre les plaintes des autres.


Selon Aaron, le traitement qu’il convient de réserver à un asshole est le “Kickass”, ce que même ceux qui ont fait allemand en seconde langue savent traduire par “botter le c*”.


Il serait injuste de qualifier le premier ministre Hollandais de « asshole », ce serait plutôt le rôle de « bad cop » qui lui conviendrait. Il faut bien que quelqu’un rappelle urbi et orbi les sains principes de prudence financière ; mais pas à contre temps, et encore faut-il avoir soi-même les cuisses propres, et ne pas, in fine, se laisser acheter par une meilleure part de gâteau fiscal.


En fin de compte, on constate qu’il s’agissait d’une négociation financière, de gros ou de petits sous. D’égoïsme et de courte vue. Ainsi l’occasion de démontrer que l’Union européenne avait une réelle existence d’affinité élective pour reprendre l’expression de Goethe, a été gâchée.




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