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Anatomie d’une déroute ou sursaut américain



La réélection de Donald Trump, est spectaculaire, et, pour beaucoup, inattendue notamment par l’ampleur de son score. C’est un événement majeur pour l’avenir des Etats-Unis, certes partagés en deux, mais dont on se rend compte que les moitiés sont loin d’être égales. Elle est, au fond, significative d’un sursaut de la civilisation occidentale qui parait moins disposée à disparaître qu’on le disait. Le message est clairement que sa messe mortuaire n’est pas dite.


Il y a peu, les bons esprits des milieux qui s’autorisent à penser s’étonnaient qu’autant d’Américains se déclarent en faveur de Trump en dépit de ses dérapages verbaux et de ses casseroles judiciaires. Il était convenu que Trump était un populiste ne pouvant plaire qu’à des arriérés mentaux, blancs rétrogrades de l’Amérique profonde, proches des Néandertaliens, sans maturité politique et voués à disparaître. Dans la dernière semaine de l’élection l’argument essentiel de Kamala Harris, relayé par une cohorte d’experts s’approuvant les uns les autres de chaque côté de l’Atlantique, fut de qualifier Trump de fasciste, certains même le déclaraient admirateur d’Hitler. La moitié ou même le quart de ces imputations infamantes aurait, chez-nous, disqualifié à vie quelque candidat que ce soit. Trump était le Diable fier de l’être, à côté de qui, à coup sûr, une dédiabolisée comme Marine Le Pen pouvait espérer la béatification.


Ce jugement définitif de l’ensemble du monde médiatique, concernant le milliardaire digne du pilori, n’a pas été suivi par une forte majorité d’électeurs américains, dont il faut bien désormais considérer le poids.


Trump est un cowboy parlant comme un gardien de vache à d’autres cow boys. La vertu que lui reconnaissent les intellectuels qui le soutiennent est sa sincérité. Une façon de marquer un défaut à cet égard de ses adversaires : démocrates, intellectuels et journalistes qui étaient perçus comme récitant le dogme du politiquement correct. En fait, en disant qu’il parlait vrai, ses partisans entendaient qu’il faisait preuve de lucidité. Il ne faisait, selon eux, que dire crûment ce qu’ils constataient par eux-mêmes à hauteur de caniveau. Plus les médias s’effarouchaient de la rudesse des propos de Trump, plus nombreux étaient les convaincus de la pertinence de ses vues.


L’habileté rhétorique de Trump fut l’invention d’une vérité alternative comme manière de dénoncer une information officielle biaisée tant dans la selection des faits que dans leur lecture. Les Américains trumpistes ont été les premiers à dénoncer le déni de réalité de leur classe dirigeante.


De tout temps et partout, les élites de gouvernement ont pratiqué un narratif orienté des événements destiné à les rendre compatibles avec leur doxa. C’est-à-dire le corps d’idées sur lesquels est assise leur légitimité et en vertu desquelles s’exerce leur pouvoir. Lorsque cette présentation diverge trop de ce que la population constate dans son quotidien, celle-ci est rappelée à l’ordre moral, taxée de s’abandonner à des penchants populistes.


De fait, en majorité, les Américains sont devenus allergiques au discours des élites intellectuelles imbibées de wokisme, et dont l’un des crédos est de désigner le mâle blanc occidental comme un réactionnaire incurablement raciste. Cette mise en accusation permanente et injuste est devenue insupportable à ceux qui en étaient l’objet. Alors surtout qu’ils constataient que la racisation de la société était par la discrimination dite positive, une forme brutale et offensante de discrimination négative à leur endroit.


En prenant pour cible le pouvoir médiatique mainstream, Trump réinstallait des millions d’Américains dans leur droit à l’égalité et leur dignité.


Dès lors, les écarts de langue et de comportement de ce tribun de la plèbe importaient peu. Il lui était même pardonné de ne pas reconnaître sa défaite face à Biden ; au regard de l’usage américain qui veut qu’un candidat battu disparaisse de la scène politique, cette contestation, au demeurant de pure forme, allait de soi.


On rabâche que l’économie est le critère essentiel des votes aux USA, comme on afffirme que le pouvoir d’achat l’est en France. Tel est la vérité des sondeurs… qui régulièrement se trompent dans leurs pronostics électoraux. Il apparait que, pour cette fois, l’économie n’a pu sauver la candidate démocrate, comptable du bilan de Joe Biden qui était loin d’être mauvais. En tout cas, comparable à celui de Trump, il ne justifiait pas une sanction aussi massive.


De fait, l’élection 2024 a été dominée par l’émotion. Certains agitant même le spectre d’une guerre civile.


Depuis qu’ils ont vu leur suprématie économique menacée par la Chine, jusque dans leurs jobs industriels, les Américains doutent de l’infaillibilité de leurs gouvernants. Le Vietnam, l’Irak et l’Afghanistan ont été de tristes et sanglantes aventures où l’image des Américains a pâli. Bien pis, ils ne reconnaissaient plus celle qu’ils avaient d’eux-mêmes. Le mouvement Maga acronyme de Make America Great Again, montre par son nom un appel à un retour de la grandeur de l’Amérique. Il illustre la nostalgie d’une époque de splendeur, qui est, au demeurant, peu compatible avec la tentation isolationniste que l’on impute usuellement à Trump. Sans doute à tort car America first ne signifie pas America alone.


En vérité, le réflexe isolationniste répond à un refus de l’image d’un gendarme du monde partout détesté. Il explique la doctrine de « l’empreinte légère » (light footprint) formulée par Obama, pour gérer l’hostilité à l’impérialisme américain qui a survécu à la disparition de l’URSS. Ne comprenant pas le manque de reconnaissance de leurs contribution à la sécurité mondiale, les Américains en ont conçu une certaine amertume. Ils ont donc reçu avec soulagement un discours à connotation isolationniste. Cependant, à l’heure où s’installe une économie de l’information mondialisée dominée par les USA, l’isolationnisme reste un mot creux.


Le raz-de-marée qui marque le retour de Trump au Capitole, par les urnes et non par la rue, porte un enseignement pour l’Europe et en particulier la France.


Alors que l’on disait la civilisation occidentale coupable de tous les maux de la planète, les Américains ont répondu par un message clair. Les Blancs ont manifesté par un bulletin Trump leur raz-le-bol d’être discriminés négativement par l’idéologie woke. Mais, fait plus inattendu, les Latinos et Noirs ont basculé pour soutenir un candidat anti-immigration, et par là affirmer leur attachement à cette civilisation occidentale. On invoquera l’effet portillon, mais cela montre bien que le rêve américain est une réalité qui mérite que l’on vote pour un hurluberlu qui seul en promet le retour. Ce ne sont pas les caves qui se rebiffent, las d’être cloués au pilori, mais un véritable sursaut d’un peuple qui refuse d’avoir honte d’être ce qu’il est.


Ce mouvement d’humeur devrait inciter les Européens et parmi eux les Français à mettre une pédale douce sur les vertus supposés des manifestations de repentance exigées par les wokistes. A cet égard, Emmanuel Macron a une révolution mentale à opérer. Ses divagations marocaines sur la splendeur de la conquête andalouse en Espagne et dans le sud de la France, rejoignant son affirmation sur la colonisation qui aurait été un crime contre l’humanité, sont tombées à plat. Les Marocains qui cherchent, de manière originale, la voie d’un Islam moderne et émancipateur n’ont aucune envie de se rapprocher de la culture française par le rappel d’un passé commun au demeurant bien lointain.


Ce discours du Président mise, pour son usage domestique, sur une vision communautariste, dont pourtant il dénonçait le danger séparatiste. Il ne pourra qu’aviver les tensions dans la société française.


La politique maghrébine de Macron est une suite chaotique d’échecs. L’exemple des relations avec l’Algérie en est l’illustration. Ulcérés du rapprochement de Macron avec le Maroc sur l’affaire du Sahara occidental, les Algériens, qui ont été, depuis longtemps, sourds à ses appels réitérés à la réconciliation, se sont avisés de reprocher à la France d’avoir volé le burnous d’Abdel Kader, et commis un génocide en Algérie.


Passe pour le burnous, encore qu’il fut offert par son petit fils, mais un génocide ? Vraiment ?.


On ne comprendra jamais la relation entre la France et l’Algérie, si l’on ne prend pas en compte le fait qu’en tant qu’État, et en tant que nation l’Algérie n’a commencé à exister qu’à travers la guerre contre la France, débutée en 1954 et terminée officiellement en 1962.


A la différence de la Tunisie et du Maroc qui étaient de longue date des Etats et des peuples et ont été administrés comme tels, l’Algérie a été constituée en partie intégrante de la France. Le décret N°136, dit Crémieux, attribua d'office en 1870 la citoyenneté française aux « Israélites indigènes » d'Algérie, c'est-à-dire aux 35 000 Juifs du territoire. Il fut complété, le même jour, par le décret N°137 portant « sur la naturalisation des indigènes musulmans et des étrangers résidant en Algérie ». Pour ceux-ci, la qualité de citoyen français n’était pas automatique puisqu’elle ne pouvait « être obtenue qu’à l’âge de vingt et un ans accomplis » et sur demande. En pratique, la naturalisation ne fut pas l’objet d’une promotion active, et ne fut que rarement demandée par les musulmans, qui restèrent presque tous sous le régime de l'indigénat. Ce rappel montre l’inanité des accusations de génocide proférées par le pouvoir algérien. Ce qui est vrai, par contre, est que le refus d’intégration dans la République et la culture françaises furent pour le moins réciproques.


Emmanuel Macron, comme bien d’autres, n’a pas compris que la seule voie de la concorde civile en France est d’intégrer totalement les Français d’origine algérienne, toute normalisation des rapports avec l’Algérie étant impossible.


La voie de l’intégration républicaine nécessite un sursaut de dignité de la France profonde. L’exemple américain montre que la chose est possible.


Chaque jour apportant une nouvelle excentricité de notre Président centriste, on a pu entendre Emmanuel Macron proposer à l’Union européenne et au delà des « solutions de défense » en remplacement du parapluie américain supposé retiré par Trump. Nul doute que les candidats à jouer au tennis avec des raquettes de ping-pong vont se précipiter sur cette offre, dont on se demande avec quelle autorité elle est formulée.


Les temps qui viennent réservent certainement leurs lots de trumperies désagréables, mais le spectacle des penauds et déconfits, qui donnaient des leçons de morale à tout va, est avouons le réjouissant. Par delà la personnalité de Trump, les Américains ont manifesté par leur vote, leur attachement à la civilisation occidentale. On peut y voir un tournant qui prend enfin à contre-pied les militants de sa mise à mort. Quant à Trump, il est sans doute le prix à payer pour des années de soumission aux diktats islamo-wokistes.





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