Après moi, le déluge !
- André Touboul
- 17 janv. 2022
- 3 min de lecture

La théorie de l’argent gratuit est une filouterie, inventée et répandue pour, sans encourir de critique, ouvrir les vannes des finances de l'Etat. Cette fiction revient à transformer le Gouvernement en une salle de shoot où la population peut continuer à se servir en hallucinogènes, narcotiques et autres substances hypnotiques, histoire de tenir jusqu’aux élections sans reprendre conscience des dures réalités de la vie.
On dit et répète que l’argent ne coûte rien, que l’on emprunte à taux négatif, et qu’il n’y a aucun inconvénient à augmenter la dette publique. C’est une « inftox », c'est-à-dire une information toxique. En effet, en 2020, la charge d’intérêts de la dette publique, c’est-à-dire la dette consolidée de l’ensemble des administrations publiques, s’est élevée à 29,7 Md€ hors frais bancaires (33,2 Md€ avec ces frais) en comptabilité nationale, soit 2,5 % des recettes publiques (2,7 % avec frais) ou 1,3 % du PIB (1,5 % avec frais). Selon le projet de loi de finances pour 2022, elle pourrait être de 32,5 Md€ en 2021 (hors frais bancaires). L'argent que l'on emprunte coûte.
Outre la question de principe du remboursement de la dette publique que le sire Macron écarte d’un « après moi le déluge » qui est le sens réel de son "quoi qu'il en coûte", et du problème de la hausse des taux d’intérêts qu’il devra affronter s’il est réélu, il est trois aspect que l’on doit considérer pour apprécier la gestion économique de la crise sanitaire, avant d’entonner un chant houellebecqien à la gloire de Bruno Le Maire. Ce sont ceux de la proportionnalité, de la pertinence et de l’efficacité des aides d’Etat.
Le Gouvernement n’a pas molli sur les montants. L’épargne des ménages a bondi pour passer à 21%% (il était de 4,8% en 2018). Accumulée dans les comptes des banques et autres institutions, elle a notamment servi à alimenter la Bourse qui a atteint des sommets historiques. Ainsi, moins les Français travaillent, plus ils sont riches ; moins les entreprises ont de chiffre d’affaires, plus la Bourse grimpe.
Bien entendu, ce matelas a permis d’amorcer la reprise, mais son épaisseur alimente l’inflation, tout autant que la hausse des coûts de l'énergie et des matières premières.
Le coût des engagements de l’Etat pour garantir les emprunts des entreprises n’a pas été comptabilisé. Une partie du total de 300 Milliards d’euros garanti devra être couverte, car ce dispositif a conduit, faute d’être sélectif, à maintenir en survie des entreprises zombies. L’efficacité de la politique économique aura surtout été politique. Elle a évité une vague de dépôts de bilans. Le Gouvernement se félicite que les défaillances d’entreprises aient été en 2020 inférieures à celles de 2019. Mais, il ne devrait pas, car cela mesure à quel point il est allé au delà du nécessaire.
On s’étonne de la difficulté de certains secteurs à pourvoir des postes de travail, cela n’a rien de surprenant quand l’épargne permet de faire les difficiles. On notera ici que l'obsession du pouvoir d'achat à laquelle reviennent toujours les médias pour dire que là est l'essentiel de toute politique, est une fiction. Privés d'occasions de dépenser pendant des mois les Français ont montré qu'ils survivaient très bien dans une économie limitée aux biens essentiels. Pour une large part, l'épargne des ménages de la période covid est une bonne évaluation des dépenses inutiles.
Les mesures destinées à « compenser » l’inflation sont à l’inverse microscopiques, et parfois ridicules. Le « chèque-inflation » de 100€ , le blocage de quelques tarifs sont plus des alibis que des protections efficaces, eu égard à l’augmentation des prix.
En fait, quand la poussière sera retombée, les Français constateront que leur niveau de vie a baissé, et que le retour de la consommation facile n’est pas pour demain. Ils découvriront que, plus encore que par le passé, il leur faudra "casquer" en tant qu’usagers pour avoir accès à des services publics, autrefois couverts par l’impôt. Ils se demanderont alors ce que l’Etat fait de l’argent qu’il prélève sur l’économie, c’est-à-dire sur eux, soit 1210 Milliards en 2020.
Plus que les vagues épidémiques, c'est le raz-de-marée financier qui doit donner le vertige.
Pour mémoire, en 2020, le déficit public aura été essentiellement celui de l’Etat : 185 M€ sur un total de 210 M€.

l’État et les organismes divers d’administration centrale (ODAC) : ces deux sous-secteurs réunis composent l’ensemble des administrations publiques centrales.
les administrations publiques locales (APUL) qui incluent l’ensemble des collectivités territoriales mais aussi les organismes divers d’administration locale
les administrations de sécurité sociale (ASSO) qui regroupent les ODASS et l’ensemble des régimes d’assurance sociale : régime général et régimes spéciaux de Sécurité sociale, régimes de retraite complémentaire ou assurance-chômage.
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