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De l’existence de Dieu, ChatGPT vs Wikipédia

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 4 mars 2023
  • 8 min de lecture






Les philosophes du monde chrétien se sont presque tous pliés à l’exercice de la démonstration de l’existence de Dieu.


Chat GPT interrogé par : quels penseurs ont tenté de prouver l’existence de Dieu ? Donne la réponse suivante :

« De nombreux philosophes et théologiens ont tenté de prouver l'existence de Dieu tout au long de l'histoire. Voici quelques-uns des penseurs les plus connus qui ont proposé des arguments pour l'existence de Dieu :

  1. Saint Thomas d'Aquin - Philosophe et théologien médiéval, Saint Thomas d'Aquin a proposé cinq arguments pour prouver l'existence de Dieu, dont l'argument cosmologique et l'argument téléologique.

  2. René Descartes - Philosophe français du 17ème siècle, Descartes a développé un argument ontologique pour prouver l'existence de Dieu, qui repose sur l'idée que l'existence de Dieu est nécessairement vraie par définition.

  3. William Paley - Théologien et philosophe britannique du 18ème siècle, Paley a proposé l'argument du dessein pour prouver l'existence de Dieu, en affirmant que l'ordre et la complexité de l'univers impliquent la présence d'un créateur intelligent.

  4. Gottfried Wilhelm Leibniz - Philosophe et mathématicien allemand du 17ème siècle, Leibniz a développé l'argument cosmologique, qui affirme que l'existence de Dieu est nécessaire pour expliquer l'existence de l'univers.

  5. Blaise Pascal - Philosophe, scientifique et théologien français du 17ème siècle, Pascal a proposé l'argument de la parie, qui affirme qu'il est rationnel de parier sur l'existence de Dieu, car si Dieu existe, le croyant gagne tout, et s'il n'existe pas, il ne perd rien.

Ces penseurs ne sont que quelques exemples de ceux qui ont tenté de prouver l'existence de Dieu à travers leurs arguments philosophiques et théologiques. »


Passons sur la brièveté de la liste. Cette selection ne correspond à aucun critère, ni logique, ni chronologique. Le robot est au niveau d’un élève moyen de philo.


On devine sa méthode de travail. Il récolte ce dont il a entendu parler. Dans tous les textes qu’il a ingurgités, il recense les occurrences, et les régurgite sous une forme pseudo raisonnée qui n’est qu’un habillage. « Voici quelques uns des penseurs… » Mais ce n’est pas la question posée. On ne lui a pas demandé des exemples. Chat GPT triche. Et le voilà qui se lance dans ce que l’on ne lui a pas demandé : la question des arguments. Ce débordement donne l’impression d’une intelligence à l’œuvre. Il n’en est rien il s’agit simplement d’un lien avec le terme « prouver » .


La faiblesse du robot, qui tient à son mode de travail, est qu’il ne cite pas ses sources, à la différence de Wikipédia. Au niveau de l’intelligence, Chat GPT est nul. Il est construit selon la méthode du râteau et du boulier, qui consiste à ratisser large et compter tout ce que l’on a ramassé.

A l’opposé Wikipédia s’attache à ce qui compte sur chaque sujet.


Que dit Wikipédia sur la question de la preuve de l’existence de Dieu ? L’encyclopédie recense les théories, les expose, les explique, et mentionne aussi les argumentations contraires. Elle voit tout ce qui compte. Son niveau est celui d’un professeur de philosophie.

Y a-t-il un autre niveau ?

Sans avoir quelque prétention que ce soit, ni arrogance, on doit répondre par l’affirmative. En effet, la question de l’existence de Dieu est d’ordre personnel. C’est dans le tréfonds de soi que l’on affronte cette interrogation.

Dieu, les Hébreux, qui s’interdisent d’écrire son nom, l’appellent l’Eternel. Son caractère majeur est donc l’infini.


L’argument ultime dans le débat est la notion de l’infini. Dès lors que l’idée de l’infini existe dans l’esprit de l’homme qui ne connaît que la finitude de sa vie, de ses actions et de ses capacités, il faut bien qu’elle y ait été mise par une entité extérieure. Ce raisonnement est peu convainquant. En effet, le simple fait que l’homme constate que les limites auxquelles il se heurte peuvent être repoussées, en tout cas pour certaines, suffit largement à lui fournir le concept d’infini. Il en va de même pour les autres notions : celles du parfait, de l’omnipotence, et de la morale.


Si l’on se place sur un plan morphologique, ce qui se rapproche le plus de la notion de Dieu, c’est celle de l’âme.

Ceux qui ont voulu peser cet élément insaisissable, en l’évaluant à 23 grammes, ont abandonné le champ du rationnel pour un simulacre de science expérimentale. Descartes, situait le siège de l’âme dans la glande pinéale. La question de l’immortalité de l’âme a inspiré le spiritisme, et plus d’une religion, avec l’Enfer, le purgatoire et le Paradis. Pour en faire une réalité, il faut admettre que l’âme peut se séparer du corps, et continuer à vivre. Encore plus fort de café, la résurrection des corps au jour du Jugement dernier. Ces croyances, très répandues sous diverses formes dans de nombreuses cultures, peuvent être comprises comme le refus du caractère définitif de la mort. Elles existent avec ou sans présence de Dieu, dont elles sont indépendantes.

Les Grecs et les Romains avaient une conception imagée du séjour des morts, d’où seuls quelques héros étaient revenus. Dans le royaume d’Hadès avaient voyagé Orphée et Sisyphe. Dante en fit une promenade poétique, prétexte littéraire à un discours politique plus actuel du temps de la Renaissance. Dans ces lieux improbables, ce sont les âmes qui séjournent.


Hélas, de tous ces récits, et même du secours de la science, l’on ne peut rien savoir de l’âme. Ce que l’on peut connaître de plus objectif à son sujet est semblable aux pas d’un promeneur sur une plage. Nous savons qu’il est passé là, sans jamais l’avoir vu, seulement aux traces qu’il a laissées.


Le mélange de rationalité et de subjectivité émotionnelle qui se réalise dans les manifestations de l’âme peut s’expliquer par une mécanique complexe. Ou pas. En effet, Tout mécanisme obéit à la loi des causes et des effets. Or, le déterminisme est parfois, ou même souvent pris en défaut quand il s’agit de conduites humaines. Par une pulsion que l’on ne sait expliquer, l’homme est l’animal qui seul tente d’échapper à son destin. Cet esprit de contradiction le pousse à réaliser des choses nouvelles, à prendre le contrepied de son éducation. Quand on examine pourquoi il se conduit ainsi, il existe toujours une part de mystère. C’est celle où l’individu s’insurge contre son déterminisme, pour écouter la voix de son âme. Elle n’est ni subjective, ni rationnelle, elle est originale. Elle est propre à chacun. L’âme est le moment où se font les choix. L’éducation, le milieu, l’expérience, tout cela intervient, mais le poids qui va être attribué à chaque facteur, c’est l’âme qui en décide.

L’âme seule surmonte les préventions et les obstacles. Elle sait décider à rebours. Elle échappe au déterminisme, car elle ne donne pas ses raisons.


L’existence de l’âme est d’une importance majeure quant à la question de Dieu, car, comme lui, c’est l’expérience d’une exception au principe de causalité.

Il est classique de dire que l’enchaînement des causes et des effets implique que Dieu ait lui-aussi été créé. Sauf, s’il forme une exception au principe de causalité.


L’idée de Dieu est inséparable de l’esprit humain. Aucune autre intelligence ne l’a conçue. On peut dire que l’homme a inventé Dieu. Au sens où il l’a trouvé, ou bien à celui où il l’a imaginé. Mais, l’existence d’une chose ne peut être prouvée à partir de sa définition, dit Kant. L’idée de cent Thalers, le prouve pas qu’il y a cent Thalers à la banque.


L’argument du Kalâm (pensée rationaliste dans l’Islam), qui indique qu’il existe forcément une cause première à l’Univers, a une faveur exceptionnelle dans la littérature contemporaine. Mais il ne répond pas à l’objection de ce qui aurait été la cause de Dieu, lui-même.


La seule façon de résoudre ce problème est de dire qu’il y a la physique le lieu des causes, et la métaphysique, là où elles n’ont plus cours.


L’hypothèse de Dieu est celle qui remplace la cause par la volonté. En cela, la notion de Dieu et celle de l’âme sont inséparables. En effet, l’âme est dans notre expérience le seul phénomène que l’on peine à expliquer par une cause, et qui fonctionne de manière libre, c’est-à-dire non causale. L’âme est un objet métaphysique.


On ne sait pas expliquer pourquoi, le cerveau humain fonctionne de telle manière qu’il échappe à la contingence. Il y a autant de neurones chez d’autres animaux, mais ils ne s’organisent pas de telle sorte que surgisse la troisième personne, ni animale, ni rationnelle, ou à la fois l’un et l’autre qui fasse échapper l’individu à son déterminisme. L’âme est cette dimension particulière de soi, où réside notre liberté.


Si l’être humain était seulement un organisme physico-chimique, il devrait reproduire toujours les mêmes conduites. Il est constant que ce qui caractérise l’espèce est sa propension à changer de comportement. A s’adapter, certes, mais aussi à se projeter ailleurs, sans y être forcé par l’environnement.


Depuis le début du phénomène religieux, la métaphysique a été la croyance en une volonté de la nature. Les Grecs ont personnifié les faits humains comme la guerre et les sentiments ; là encore, c’était conférer une volonté aux Dieux ; Mars ou Eros, par exemple. Le monothéisme a concentré en un seul être toute la volonté et toute la puissance.

Quand l’homme regarde en lui-même, il perçoit une zone de décision, une volonté donc, qui échappe à ses émotions et tout autant à son raisonnement. Il en déduit que parfois ce sont les premières qui l’emportent, et parfois le second. Ce qui fait pencher la balance, dans un sens ou l’autre, est une volonté qui lui parait supérieure à lui-même, un sur-moi, qu’il désigne sous le nom d’âme.


L’âme n’est pas forcément immortelle. On n’a, en fait, aucune preuve qu’elle le soit, mais elle a une idée de l’infini. Elle n’est pas non plus parfaite, mais elle a une idée de la perfection. Elle n’est pas toute puissante, mais c’est en définitive, elle qui décide. Elle a une idée du bien, aussi, car elle est attentive à l’autre comme miroir de soi, et double inséparable.


De toutes ces puissances de l’âme, le Dieu du Livre a hérité. Si c’est Dieu qui a donné son âme à l’homme, on peut dire avec Voltaire que celui-ci le lui a bien rendu.

L’objection principale à l’existence d’un Dieu unique est le fait que tous les hommes sur cette Terre ont une âme, ceux qui croient en Dieu et ceux qui n’y croient pas. Cette incroyance ne les prive pas de morale, d’idée de la perfection, ni de celle de l’infini.

Mais replaçons nous dans la dimension temporelle. Il y a un chaînon manquant entre l’être doté d’une âme, et l’animal le plus habile. L’évolution est présentée comme un mouvement certes buissonnant, mais continu, cependant l’espèce humaine ne parait pas évoluer. Elle constitue une exception. Elle ne s’hybride pas avec d’autres. Qu’on le veuille ou non, elle constitue un terminal de l’évolution. Les antispécistes, qui nient la spécificité de l’espèce humaine au nom d’une prétendue continuité du vivant, ont une vision de ce dernier marquée par l’évolution. Ils sont toutefois incapables de donner un exemple de variation de l’espèce humaine dont il faut bien admettre qu’elle est particulière.


Il y a dans l’évolution du vivant des sauts qualitatifs. Mais aucun ne met fin au mécanisme. L’homo sapiens est une page nouvelle de complexité. Si elle doit être la dernière, l’hypothèse d’un projet abouti devient vraisemblable. En effet, plus que l’ordre du monde qui peut être de la main du hasard, ce serait le fait que ses rouages s’arrêtent à un certain point qui implique l’œuvre d’une intelligence supérieure.


Une erreur tragique serait de parler d’Homo Deus, puisqu’il trouve en son âme tout ce qu’il faut pour assurer la fonction divine. En effet, comme le disait Kant, il y a loin de l’idée à la réalité effective. Il serait fatal à l’homme de se croire infaillible.


Encore moins infaillible est l’intelligence artificielle. Le robot musqué (d’Elon Musk) est capable humour involontaire. Quand on lui demande : que faut-il faire en Ukraine ? Il répond, toujours sur le modèle énumératif, et ses suggestions sont toutes : faire du tourisme. De la guerre, pas un mot.

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