Décivilisation
- André Touboul
- 1 juil. 2023
- 2 min de lecture

Le débat est ouvert. Les violences sont à la fois de plus en plus visibles et de moins en moins supportables. C’est, disent certains, non un signe de faiblesse de la civilisation mais le contraire.
Il y a cependant un biais dans cette approche d’apparence évidente. En effet, si la sensibilité à la violence existe, il est contestable d’affirmer que la société est plus civilisée, car elle s’émeut plus souvent, dès lors que l’on a plus souvent l’occasion de s’émouvoir par une meilleure et plus immédiate connaissance des faits.
Ainsi l’argument des défenseurs d’une civilisation améliorée est à ranger dans le tiroir aux chaussette réversibles.
Les statisticiens interviennent pour fournir des données dites « brutes ». Mais l’on peut aussi gloser sur les chiffres, et la façon de les collecter, les comparer… En la matière, l’on ne peut que se fier à des données recueillies de la même manière donc sur une courte période. Les durées brèves ne sont pas significatives en termes de civilisation.
Plus pertinente serait l’analyse qualitative.
Dans toute société, quelque soit son degré de civilité, il existe des infractions. La situation devient préoccupante quand la nature même des crimes n’est pas du ressort de l’accident individuel inévitable, mais relève de la mise en cause des fondements de la société.
On ne peut évidemment comparer les assauts de tenants d’une autre civilisation, des ratés de la notre. Ces derniers ne sont pas à ranger dans la catégorie décivilisation, si les premiers deviennent sensibles, il devient clair que la civilisation est menacée.
Si devant ce danger existentiel les dirigeants ne font rien, détournent le regard, ne veulent pas faire de vagues, il est patent que la civilisation décline.
En parlant de « décivilisation » le Président Macron, volontairement ou non, a pointé un comportement coupable de ceux qui, fonctionnellement gardiens de la civilisation la laissent s’étioler sans la défendre. On dira avec raison que le Président est au premier rang de cette responsabilité. Il était donc urgent pour lui de tirer la sonnette d’alarme. La vraie question est de savoir s’il doit ou peut s’arrêter là. Le bon sens commande de répondre par la négative.
Quand la maison brûle, dirait Jacques Chirac, il ne faut pas regarder ailleurs, mais il faut aussi appeler les pompiers, se saisir de seaux d’eau et sauver les meubles.
A cet égard, Emmanuel Macron ne propose rien. Attention, Monsieur le Président, à ne pas devenir comme un certain François Hollande, spectateur et commentateur de votre propre mandat.
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