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Il ne faut pas gâcher la fête

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 4 mars 2023
  • 3 min de lecture


L’argent n’a pas d’odeur, mais nul doute que s’il en avait une on la trouverait agréable, dit le sage. Il dit aussi que c’est un bon serviteur, mais un mauvais maître. L’argent a fait irruption dans le sport. Mais quel sport ? Pas celui que l’on pratique en faisant son jogging. Un peu dans les disciplines où les vendeurs de matériel se gobergent en exploitant la crédulité des pratiquants, avec quelques progrès néanmoins. Non, l’agent a investi le sport que l’on pratique immobile affalé devant son téléviseur, où que l’on va soutenir dans les stades. Le sport spectacle.


Cette révolution culturelle a pris une dimension planétaire. Elle transcende les régimes politiques, les religions, les sexes et les générations.


La rencontre d’un engouement massif avec une masse de capitaux a produit une catégorie de personnages pittoresques parfois, lamentables souvent, tyranniques toujours. Les dirigeants sportifs.


On savait que les dirigeants de fédérations sportives internationales étaient des personnalités dont l’extraterritorialité les rendait mégalomanes. Et parfois imprudents quand les tentations monétaires s’offrent à eux, c’est à dire en permanence.

On savait que les Jeux Olympiques sont un spectacle plus qu’une épreuve sportive, et que la corruption est présente dans les couloirs des délégués où circulent liés promesses et les malettes de billets.


On savait que les sponsors, joli vocable pour parler de ceux qui achètent les services commerciaux des fédérations, déversaient des tombereaux de monnaie pour faire valoir leurs marques.


On sait maintenant que ce sont eux qui font la loi du sport. La dure loi du sport n’est pas la confrontation des athlètes, mais celle des sponsors. Ainsi Adidas, qui arrose la fédération de judo française, exige que les sportifs portent ses kimonos, et plus ceux de Mizuno, l’ancien sponsor. Malheur à la judoka qui n’aurait pas mis à jour sa garde-robe. La Fédération la rejètera, pour protéger son contrat.


On en vient à regretter le temps où le sport était le fait d’amateurs, et qu’il faisait partie de l’éducation sans s’y substituer.


Dans touts les sports l’argent s’est mis à couler à flots. Les télévisions, les firmes commerciales, se sont lancées dans une course de surenchère. Et comme toujours, l’argent, facilement gagné par les organismes sportifs, est une source de corruption.


Pour un peu on entendrait ce petit monde de profiteurs des efforts des champions déclarer qu’ils participent à l’amélioration de l’espèce. Les sélectionneurs, les soigneurs, les coachs, les masseurs, les psys… et les chimistes, tout ce monde interlope prospère sur les rêves d’adolescents qui croient que la gloire et la fortune sont au bout de la sueur et des larmes.


Ces gladiateurs des temps présents usent leur carcasse pour notre distraction. Certains en meurent. D’autres s’y brisent. Et pas toujours ceux qui ne gagnent pas. On pense à Michael Phelps, le nageur qui s’est noyé dans sa propre gloire. On oublie les reconversions ratées. D’ailleurs qui se soucie du devenir du champion quand la télévision est passée à un autre spectacle.


Mais pour qu’il y ait spectacle, il faut qu’il y ait record, alors on court après les millièmes de seconde, on se dispute le nombre de médailles. Et l’on triche. Sottement comme l’ex-RDA, ou la Russie. Plus sournoisement comme les cyclistes.


Le peuple a autant besoin de jeux que de pain. Les empereurs romains en étaient conscients. Mais, de grâce, tout ce monde de cloportes dont font partie les dirigeants de fédérations, petits chefs entre les petits chefs que sont les entraîneurs, qui abusent de leurs fonctions, devraient être sommés de rester en coulisse. Le spectacle de leurs turpitudes gâche la fête.



 
 
 

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