Immigration : L’appel d’air. La faute à qui ?
- André Touboul
- 5 oct. 2020
- 3 min de lecture

Zemmour a encore dérapé en assimilant l’immigration à la délinquance, provoquant des sueurs froides à la rédaction de C-NEWS. L’homme est trop finaud pour que ce ne soit pas volontaire. il savait qu'il mettait le feu aux poudres, et serait une nouvelle fois poursuivi en justice.
Cela fait partie d'un plan de communication, mais un très maladroit. Avec une élégance sans égale, Christine Kelly l’a tancé vertement, comme un gamin mal élevé. A raison, car quand on fait profession de parole publique, la maitrise du verbe est un devoir minimal. Cet incident ne peut néanmoins supprimer le problème qui est réel.
L’immigration est un casse-tête. Les hommes de bonne volonté (et les femmes, bien sûr) voudraient trouver une réponse sensée entre les imprécations égotistes des démagogues qui professent qu’il suffit de fermer les frontières, la résignation de ceux qui prédisent que la submersion est inéluctable, et les leçons de morale moisie des no-borders qui bien calés dans leur confort de bobos ne voient jamais la misère qu’à la télé, et parlent des pauvres qu'ils ne connaissent que de nom.
On dénonce souvent l’attrait du système social français. Cette explication comporte sa part de vérité, car les sommes concernées par l’aide sont loin d’être anecdotiques. La fraude est certainement favorisée au sein de groupes non intégrés dont le contrôle de l’environnement est très flou, car malaisé. Il faut le dire aussi, le fonctionnaire de base répugne à faire des vagues et à s'exposer au reproche de racisme ou de xénophobie.
Cependant, ce fait n’explique pas pourquoi la Grande Bretagne qui dispose d’un régime d’allocations minimal est beaucoup plus attractive pour les migrants. Il y a certes la question de la langue, mais beaucoup de migrants ne parlent pas plus l’anglais que le français.
Il reste que l’économie britannique est beaucoup plus libre d’employer des travailleurs en situation précaire, et qu’elle en est très friande.
On note d’ailleurs que quand les immigrants sont plus qualifiés le Royaume Uni n’en veut plus. Il préfère se séparer de l’Europe pour faire cesser les arrivées d’Europe de l’Est. Le principal moteur du Brexit a été ce rejet d’une immigration intra-européenne, alors que les arrivants non qualifiés ne posaient pas de problème aux yeux des britanniques.
Cette demande de chair fraîche existe aussi en France, que ce soit dans le secteur de la restauration, du bâtiment ou même dans le banditisme qui emploie désormais avec efficacité des mineurs ou supposés tels, sans parler des esclaves de la prostitution.
L’existence d’une aide sociale permet, ou plutôt, si elle était gérée avec soin, devrait permettre de contrôler mieux les zones grises d’emploi.
C’est, de fait, l’emploi clandestin ou à bas coût qui a alimenté depuis toujours l’immigration.
La gestion des flux migratoires commence par le contrôle des employeurs, et non par la fermeture hypothétique des frontières dont on constate chaque jour qu’elles sont perméables.
Les pouvoirs publics ont, depuis des décennies, encouragé les immigrations pour "faire tourner l’économie". L’automobile française a prospéré grâce à l’afflux de travailleurs du Maghreb, et Giscard d’Estaing y a prêté la main en permettant le regroupement familial. Non pas pour des raisons humanitaires, mais pour augmenter le stock de main d’œuvre bon marché. Ainsi s’est constituée une population que nul n’avait intérêt à intégrer. Il est d’ailleurs extraordinaire que malgré cela une véritable élite de la deuxième génération se soit formée. Hélas, la troisième génération s’est trouvée perméable aux discours Islamistes, autre voie, avec celle des écolos-décroissants, pour refuser le monde moderne.
La politique cynique de fourniture de main d’œuvre a été habillée à gauche par des considérations morales de solidarité, elle avait le même objet.
Cette vue à court terme n’a pas empêché la désindustrialisation, car même peu payés les migrants coûtaient plus cher que des chinois non rémunérés, maintenus au seuil de subsistance.
La demande de main d’œuvre à bas coût subsiste aujourd’hui en France dans quelques secteurs licites ou non.
Bien que le terme soit désormais ringard, il faut admettre que la question de l’immigration ne peut être dissociée de celle de la constitution d’un nouveau prolétariat. Dès lors, ce n’est pas en rejetant les immigrés que l’on pourra calibrer les flux migratoires, mais en les intégrant. C’est à dire en rendant un travailleur immigré semblable à un salarié national.
Si un travailleur migrant coûte aussi cher qu’un national, ou même plus cher, la source de l’appel d’air migratoire sera sinon tarie, en tout cas sérieusement modérée. Aujourd'hui, le travailleur migrant coûte aussi cher qu'un national, mais à travers les prestations publiques, ce qui fait que le pays cumule les inconvénients.
Cela montre que la gestion de l’aide aux migrants doit être repensée et confiée moins à des assistantes sociales qu’à une police du travail. Non pour sévir contre les migrants exploités, mais contre ceux qui en tirent profit. Ceci dit, hors de toute considération idéologique, mais par pur réalisme.
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