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L’homme de Tourcoing ? Trop petit, mon ami…

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 28 août 2023
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 29 août 2023




Quand ils pensent à qui iraient leurs suffrages pour succéder à Emmanuel Macron, les Français ne fantasment sans doute pas sur Mélenchon le poussiéreux policard usagé qui est plus ridicule que moderne par ses meetings en hologrammes. Un tel personnage peut séduire quelques étudiants de Sciences Pipo qui comme lui s’imaginent en position future de tournebouler la France sans tenir compte de ce qu’elle est ni veut.


Les pieds plats, le terre-à-terre, sont des qualités qui font souvent recette, on doit certainement les accorder à la dame Le Pen, mais que restera-t-il de tout son crédit largement dû a son mutisme quand elle ouvrira la bouche…


Il est assez prévisible que le choix du prochain Président devra se faire parmi ceux qui ne veulent pas renverser une République imparfaite mais qui a montré sa capacité d’évolution sans révolution. Les soubresauts qui ont secoué la France, depuis ceux de 68, se sont vite calmés. Le Grand Soir n’est pas pour demain matin. Les Français paraissent plus nombreux à être tentés par les extrêmes, mais la convergence de ces pôles opposés, qui a pu se réaliser ailleurs, comme en Italie du temps des 5 Étoiles, est ici impossible. Le populisme ainsi divisé n’a aucune chance de réunir une majorité. Il est prévisible que pour la prochaine présidentielle sera choisie la personnalité qui aura une certaine crédibilité dans sa capacité d’assumer les complexes responsabilités du pouvoir. Bien que l‘arrivée de la course de petits chevaux présidentiables soit encore loin, certains prennent le départ.

Malgré le soutien de Nicolas Sarkozy (un atout vraiment ?), Gérald Darmanin, qui le premier déclare ses ambitions, paraît plus être un chauffeur de salle, qu’un candidat sérieux. D’évidence, il n’a pas la pointure d’un monarque fût-il républicain. François Hollande l’a montré, il faut être plus que normal pour habiter une fonction taillée pour des être d’exception.

Pour rééditer l’exploit de Sarkozy qui le premier a réussi à émerger sans posséder une vraie culture ou des diplômes de haute école, il lui faudrait le bagout de son prédécesseur Place Beauvau. A supposer que ce handicap puisse être surmonté par le coup de baguette d’une fée experte en communication qui lui donnerait une soudaine éloquence dont est privé ce Démostène avant les cailloux, le personnage ne remplit aucun des autres pré-requis qu’exige la fonction.

Il lui manque la formule magique, la bannière qui claque. Celle qui fit gagner Sarkozy en 2007 en proclamant qu’il fallait « travailler plus, pour gagner plus ». Ce slogan lui a permis de siphonner la clientèle du Front National. Par son franc parler il avait pu rallier ceux qui s’étaient égarés à l’extrême droite par lassitude de l’hypocrisie d’une droite complexée qui ne s’assumait pas, préférant, comme Chirac, jouer les rois fainéants.

L’illusion d’un Darmanin est de croire qu’aujourd’hui, c’est le social qui fait l’attractivité du Rassemblement National.


Certes, Emmanuel Macron aura longtemps, 10 années, confondu le social et le sociétal. Durant ses mandats, il aura concédé aux gadgets à la mode (qui ne coûtent rien) pour mieux serrer la vis économique aux ménages. La force du RN est de souligner ce choix, et ce parti prospère en promettant moins de sociétal et plus de social. Nul ne doute que sur les simagrées wokes, les Lepénistes soient aptes à refuser toute concession, mais sur le social leur discours est tout en trompe-l’œil.


Qui peut croire que l’on va rouvrir les vannes des allocations, que l’on va revenir à la retraite à 60 ans, qu’il suffit de fermer les frontières aux immigrants pour que les caisses de l’Etat se remplissent ? Ces promesses auront le même sort que la sortie de l’Union européenne ou l’abandon de l’Euro pour revenir au Franc… ce sera le bûcher des vanités du Lepénisme, bien plus que les diableries de son fondateur.

En allant combattre le RN sur un terrain moral qui n’existe plus ou social qui n’a jamais existé, Gérald Darmanin occupe les médias, mais ne construit rien. Car, de fait, il n’y a rien à bâtir. L’Etat est impécunieux et ses promesses d’aide sont fallacieuses. Le seul langage qui convienne au temps présent est celui du Charretier embourbé : « Aide-toi et le Ciel d’aidera ».


Cette formule est un appel à la responsabilité et à l’effort, elle ne peut passer pour une orientation sociale, car en France on confond le social avec la subvention, l’allocation et l’assistanat.


Pour faire peuple, l’homme de Tourcoing invoque sa « mère femme de ménage ». Il renoue ainsi avec une stratégie des années piteuses qui vont de Giscard à Chirac, un must du personnel politique d’alors que l’on soulignait dans Les Cinq Mille, Fortune et faillite de l’élite française, publié en 2014. Être de basse extraction, et le fin du fin, avoir une mère femme de ménage, était un brevet de bonne vie et mœurs, un certificat de défenseur du peuple. Brevet de réussite malgré le handicap social, il était invoqué comme une preuve de désintéressement dans un monde politique où tous étaient censés être pourris par l’argent.


Faible démonstration, car l’on est jamais trahi que par les siens. Ainsi Emmanuel Macron a trahi les grands corps de l’Etat dont il était issu. Ainsi François Mitterrand, bourgeois d’un milieu et d’une culture très conservatrice, est devenu l’architecte d’une France collectiviste d’assistés animés par la haine des riches. Rien ne garantit que venir d’une famille modeste fasse de vous un défenseur du peuple.


Au demeurant, Darmanin devrait savoir qu’il est ringard de dire « femme de ménage », on doit dire désormais « technicienne de surface ». En vérité, si l’on se soucie du vrai, sa maman était « concierge », selon Wikipédia qui semble ignorer que l’on dit désormais « gardienne d’immeuble », et son papa était « tenancier de bar » selon la même source qui décidément n’enjolive rien,  


Quand il aura épuisé tout le médiocre crédit qu’il doit au soutien de Nicolas Sarkozy, le Ministre de l’Intérieur, se trouvera tout nu ; d’autant que si son modèle avait fait illusion quand à sa capacité à juguler l’insécurité, Darmanin s’est trop compromis avec la tisane tiède du macronisme pour jouer les gros bras.

« Trop petit, mon ami » dirait James Hadley Chase. Le rôle du prochain chef de l’Etat ne pourra être attribué à un cogne-mou. Or si, comme on le jaspinait en argot, Darmanin est un cogne, il est même le chef des cognes, il lui manque la main de fer dans le gant de boxe.

La fermeté de Darmanin a montré ses limites, elles sont trop étroites. Sa posture de lutteur de foire qui soulève des poids factices sur la Place Beauvau est un pitoyable échec. Le Président déplore les brutalités policières, et l’extrême Gauche proclame que la police tue, mais dans le même temps l’opinion est excédée par les preuves d’insécurité qui se succèdent transformant des faits divers en faits de société.

L‘impuissance envers les fauteurs de troubles et les dynamiteurs de la paix républicaine, le déni de réalité qui parle encore de sentiment d’insécurité, tout concourt à en incriminer la mollesse du pouvoir. Le trafic de drogue que Darmanin désigne comme source de tous les maux, a bon dos ; on sait bien qu’il s’installe là où la loi de la République a renoncé.


En se rendant au meeting de l’été de l’ambitieux qui rêve de lui succéder avant de monter à l’Elysée, la Première Ministre lui a notifié qu’il ne fallait pas dépasser les bornes.


Sans doute, quand Nicolas Sarkozy manifeste son soutien à cette pâle copie de lui-même qu’est Gérald Darmanin, on se demande s’il ne veut pas avant tout souligner à quel point il lui fut supérieur. Au moment où des magistrats politisés lui font un bien mauvais procès sur le rocambolesque financement lybien de sa campagne de 2007, et quand il s’est fourvoyé dans de stupides déclarations pro-Poutine, un petit regain d‘estime de la part de l’opinion serait un baume souverain pour son cœur meurtri.


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