La Bérézina de la vaccination
- André Touboul
- 1 janv. 2021
- 3 min de lecture

La palme de l’incongruité peut être attribuée à Jean Castex, alias Monsieur Cyclopède, qui devant l’Assemblée Nationale éprouva le besoin de préciser que la vaccination des pensionnaires dans les EHPAD serait opérée sur la base du volontariat et précédée d’une information éclairée. On imagine la scène, et l’on hésite entre le comique et l’odieux. Mais la réalité est plus sordide, il s’agit de s’assurer par la signature de décharges que les vaccinés ont bien pris connaissance des risques et donc de se prémunir contre les recours judiciaires en cas de pépin. Sous une apparence de gaucherie, c’est un magnifique moment d’hypocrisie administrative que nous a offert le Premier Ministre.
Et pendant ce temps Monsieur Véran « assume » la lenteur. 200 personnes vaccinées en France ce 31 décembre, contre 130.000 en Allemagne, et 9.800 en Italie.
Quelle légitimité ya-t-il à ne pas donner accès aux volontaires pour se faire vacciner ?
Comment les médecins de ville vont-ils se débrouiller avec des vaccins périssables et livrés par flacons de doses de cinq. Autant leur demander de vacciner avec des fraises des bois, après avoir autant de fois récité la recette de la bouillabaisse.
De loupé en fiasco on s’achemine vers une Bérézina vaccinale, sur la logistique car les doses sont là, les mêmes qu’en Allemagne. Pourquoi attendre ? Que le vaccin français soit enfin prêt ? Le même aveuglement que pour les applications anti-covid ?
La dernière perle de nos gouvernants aura été l’idée de créer un Conseil citoyen pour la stratégie de vaccination. L’administration du vaccin pour les nuls ? Pas du tout. Il faut y voir l’habileté de fonctionnaires sans courage de refiler le mistigri à des irresponsables encore plus irresponsables qu’eux. Les naïfs parleront de démocratie directe, alors qu’il ne s’agit que d’une feinte de corps.
L’art de l’esquive est chez le bureaucrate une seconde nature, une sorte de réflexe conditionné, qui parfois lui joue de vilains tours comme pour le comité Théodule proposé spontanément par le Gouvernement lors de l’affaire de l’article 24 de la loi sur la sécurité, une insulte au Parlement qui a laissés ébahis les Sénateurs et même bon nombre de Députés.
Nous vivons sous le régime des Hauts Conseils. Haut conseil pour le climat, Haut conseil pour la santé publique, Haute autorité de santé, Haut conseil de stabilité financière, Autorité des marchés financiers, Autorité des normes comptables, Haute autorité pour la transparence de la vie publique...
Toutes ces altesses autoritaires dispensent les fonctionnaires en charge de prendre quelque risque que ce soit. Ces instances sont, au demeurant truffées de fonctionnaires, mais jouent le plus souvent un rôle de conseil, donc ne sont pas responsables des effets des avis qu’elles prodiguent, et dédouanent les agents de l’Etat qui s’en remettent à elles.
Le sommet de ce système idéal où chacun couvre chacun, est la proposition de créer un organe indépendant pour contrôler la police, Ainsi la haute hiérarchie policière se lavera les mains des bavures. Si la discipline ou la vertu ne sont pas satisfaisantes, elle pourra renvoyer la balle à l’insuffisance de l’autorité indépendante, laquelle n’ayant qu’un rôle externe pourra invoquer son impuissance face à une organisation lacunaire. Plus honnête aurait été de proposer la présence d’élus dans les instance de l'IGS.
Malgré sa responsabilité directe dans la pénurie de masques établie devant le Sénat, Jérôme Salomon est plus discret mais toujours là. On invoque son amitié avec le Président, mais celle-ci n’est pas nécessaire, les hauts fonctionnaires comme lui sont intouchables. Le manque de masques a été à l’origine du retard dans la mise en place de cette protection et permis la diffusion du virus pendant la première vague. On peut se demander combien de milliers de morts il faut pour qu’un haut fonctionnaire fautif soit limogé ?
Apparemment la seule chose que sache faire le pouvoir c’est d’édicter des interdictions, puis de faire donner la police, et on croit halluciner quand on voit un Préfet de police citer Trotsky dans sa carte de vœux.
On sait aujourd’hui que le Gouvernement retient des vaccins, ou plus exactement n’organise rien pour les volontaires. Malgré ses simagrées, il n’échappera pas à un procès en responsabilité... le premier indice en est qu’il ait été lâché par l’Académie de Médecine.
Il y a d'autant plus urgence à ne plus tergiverser sur les vaccins, qu'aux dernières nouvelles, une mutation du virus le rendrait beaucoup plus contagieux. Cette perspective implique le risque de devoir se reconfiner pendant des mois. La République n’y survivra pas.
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