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La revanche des 5000, une potion amère

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 21 juil. 2023
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 22 juil. 2023





Dans un article publié par Le Figaro, le lendemain du remaniement ministériel du Gouvernement Borne 3, François Villeroy de Galhau, très haut fonctionnaire, Gouverneur de la Banque de France, dresse un tableau lucide du fiasco financier de l’Etat. De 1980 à 2022 la dette publique bondit de 20% du PIB à 112 %. C’est, dit-il avec raison, dû au fait que la dépense publique en est passée de 46% à 58 %. Il aurait pu ajouter qu’ainsi la France n’est plus une économie mixte, mi-publique/mi-privée, mais un système collectiviste ultra-étatisé, et que sur cette pente, la tendance ne peut que s’accentuer. Il aurait aussi dû souligner que ce fait incontestable n’empêche pas les intellectuels français qui sont prépondérants dans les médias de faire le procès permanent d’un prétendu néo-libéralisme d’Etat qui n’existe que dans leur imaginaire.


Monsieur le Gouverneur d’une Banque Centrale qui n’est désormais plus que spectatrice de la politique monétaire, qui se décide à la BCE, constate que cette dérive financière s’accompagne d’une dégradation des services publics. Il ne tire pas pour autant de ce bilan d’échec l’enseignement que la haute fonction publique puisse avoir une quelconque responsabilité dans ce qui constitue la prouesse de faire toujours moins bien avec sans cesse plus d’argent. On cherche vainement dans son plaidoyer pour la fonction publique un mot sur la responsabilité de cet exploit catastrophique digne d’une médaille olympique avant les Jeux.


Sa solution ? Fort de sa propre expérience à la Banque de France (laquelle ne fait au demeurant plus grand chose de concret) dont on devine qu’il aurait réduit (ou contenu) les dépenses, il propose d’investir les chefs de service de plans pluriannuels. On ne saurait mieux dire que la permanence l’emporterait sur l’éphémère. C’est ainsi que, depuis des lustres, l’administratif triomphe du politique.


Le service public est trop important pour qu’on le soumette aux caprices des élus de passage, qui rappelons-le sont présumés « tous pourris ». Telle est la thèse de la caste des 5000. Ne sont-ils pas les prêtres et le clergé de cette religion qui répute bon ce qui l’est aux yeux de la machine de l’Etat. Ce qui lui est profitable est la seule mesure du bien public. Ce n’est pas au peuple de décider du contenu de l’intérêt général, mais à eux. Le déclassement, la dégringolade, l‘insécurité, la débâcle culturelle et la perte d’identité nationale, ne sont que des sentiments qu’il faut combattre car frappés du stigmate du populisme. Cette attitude porte un nom, le déni de réalité. Mais désormais les faits leur explosent au visage, revêtus de gilets jaune, de mortiers d’artifice, ou sous la forme de check-points de »quartiers », de plus en plus nombreux en France, où la police n’entre que comme dans un bain glacé, pour en ressortir plus vite qu’elle n’y est entrée. La réalité se venge d’avoir été négligée.


Longtemps, ils ont donné le change, dissimulé l’échec ou l’imputant à d’autres. Leur propre responsabilité ? Ils ne l’envisagent même pas, qu’alors qu’elle est majeure, sinon unique. Fine fleur de plusieurs générations, ils ont emprunté la voie royale du service de l’Etat, accru ses pouvoirs, augmenté ses effectifs, multiplié ses besoins financiers. Le manque de moyens et d’effectifs est néanmoins leur mantra.


Le seul grief qui peut être adressé aux politiques, c’est de s’être soumis à une « compétence » de ces 5000, qu’il était interdit de discuter. L’ENA, la mère nouricière de l’élite de la Fonction publique, était l’école de l’excellence où l’on apprenait rien d’utile pour faire face aux défis du monde d’aujourd‘hui, sauf à avoir toujours raison. Il ne pouvait en être autrement puisque que l’Etat dit ce qui est vrai et que l’Etat c’est eux.


Avec courage, Emmanuel Macron a pointé la responsabilité de ces dirigeants de fait en supprimant l’ENA et abolissant les carrières toutes tracées des Grands corps, non visés par la Constitution. Il s’est, par le fait, mis à dos cette élite de pouvoir qui ne soutenant plus le Président, incitent les médias, sur lesquels ils exercent un contrôle idéologique de pensée dominante, à lâcher les chiens contre lui. Quoiqu’il fasse, Emmanuel Macron est l’objet d’un dénigrement systématique. La meute médiatique des médiocres aboie avec un bel ensemble.


Alors pourquoi, le Président a-t-il confié les comptes publics à un inspecteur des finances Thomas Cazenave, certes membre de son parti, mais qui est un politique inexistant. Par lui, c’est le Trésor qui reprend la main sur la caisse. Ce qui est « possible ou impossible » sera édicté par l’Inspection des finances. Ce qui est « souhaitable«  n’aura plus le moindre sens à Bercy, donc à l’Elysée. La réponse est simple, il n’avait pas d’autre choix. Ne pouvant plus faire de politique, il s’en remet à l’Administration.

Le « tout-Etat » est la doctrine qui s’impose aussi avec Aurélien Rousseau, Conseiller d’Etat qui a commencé sa vie politique au Parti communiste, qui prend en charge la Santé. La médecine libérale sait ce qui l’attend.


Seul acte d‘indépendance du Président vis-à-vis de la haute fonction publique, aura été la nomination de Gabriel Attal à l’Education Nationale. Mais celui-ci a dû, lors de son entrée en fonction, s’excuser d’avoir été élève de l’école alsacienne, prestigieux établissement privé.


Certes, on ne peut gouverner la France d’aujourd’hui sans l’Administration, mais il sera fatal de s’en remettre à elle en tout. Convaincu de cela, le Président, recevant en un premier Conseil, les ministres nouveaux et reconduits, leur a déclaré que leur mission ne consistait pas à « parler à la radio », mais qu’ils devaient « diriger leur Administration »… et non s’y soumettre. Cette injonction avait tout du voeux pieu. L’autorité ne se décrète pas, elle s’appuie sur une légitimité politique, or cette épaisseur manque totalement aux membres du Gouvernement Borne 3.


Comble de l’humiliation pour le Macron, tombeur de la haute fonction publique, le dernier remaniement du Gouvernement Borne aura consacré la victoire des technocrates, plus incontournables que jamais. Tant pis pour les Français, les mêmes causes produisant les mêmes effets, la revanche de la bureaucrature conduira à plus de dépenses et moins de services. Le modèle vers lequel l’on se précipite est celui d’une bureaucratie totale dont on a vu les conséquences en URSS.


Vexés dans leur conviction d’être le sommet de la compétence et de détenir la vérité, nos irresponsables jamais coupables, devenus experts en déni des réalités, ne s’arrêteront jamais, pas même sur les décombres d’un pays qu’ils auront ruiné. Leur dernier coup de force aura été d’isoler Emmanuel Macron, le rendant infréquentable pour les dernières personnalités politiques raisonnables qui subsistent dans le champ de décombres politiques qu’est devenu la France voulue par les 5000.


On se souvient de la plaisanterie qui affirme que la différence entre un énarque et une locomotive est que cette dernière, elle, s’arrête quand elle déraille… Elle fait plutôt rire jaune aujourd’hui, quand c’est à l’abomination de la désolation que nous destinent ces mauvais gestionnaires arrogants.

Dans la légende du Roi Arthur, la maladie du prince coincide avec l’hiver qui s’abat sur le pays, le corps du roi est celui de sa nation. En criblant de flèches le monarque républicain, les hiérarques labellisés 5000, et leurs hiérodules des médias jouent contre l’intérêt de la France. Certes, le Président n’est pas à l’abri de toute critique, mais quand, quoiqu’il fasse, dise ou ne dise pas, il a toujours tort, ce sont les courtisans qui démolissent le château où ils habitent. Ils en seront fatalement les victimes, leur revanche d’aujourd’hui sera une potion amère. Mais, hélas, le peuple français aussi en subira les conséquences. Il ne pourra s’en prendre qu’à lui-même, car un peuple n’a jamais que les dirigeants qu’il mérite.


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