La réserve du patron
- André Touboul
- 13 janv. 2022
- 4 min de lecture

Dans toutes les bonnes maisons, il est quelques bouteilles de derrière les fagots que le tenancier réserve aux connaisseurs. En voici, bien entendu en vrac, quelques unes, façon cocktail Molotov, en provenance directe de la réserve du patron.
Est-il crédible de se lamenter de la dictature des Gafam et en même temps de ne pas enjoindre aux collectivités publiques de supprimer leurs comptes Facebook ?
Est-il sensé de tolérer l’existence des cryptomonnaies et de déplorer les preneurs d'otages informatique qui se font payer facilement et imparablement les rançons par ce moyen. On peut fort bien régler cette question d’un trait de plume, la Chine l’a fait.
Joe Biden veut régler le problème de l’Ukraine. Quand on pense à la manière dont il a géré l’Afghanistan, on est soulagé… de ne pas être Ukrainien.
Le CAC 40 passe les 7300 points. Quand on arrose le jardin à grande eau, inévitablement l’herbe pousse, surtout la mauvaise.
L’avantage du metavers est que, dans ce monde parallèle, on a jamais de cors aux pieds, mais on ne va pas non plus bien loin.
L’intersectionalité atteindra sa perfection en se déconstruisant elle-même.
On n’a jamais vu autant de philosophes dans les médias et jamais aussi peu disposé d’instruments utiles de pensée.
Le débat est la différence subtile qui se glisse entre la liberté d’expression et le dialogue de sourds.
La Chine est l’atelier du monde. Il n’est pas surprenant qu’elle soit dirigée par des contre-maîtres.
Proverbe chinois : quand les clients manquent, l’usine crève.
Le Président Kazakh fait tirer sur les manifestants « pour tuer », il assume. Notre Président se contente d’emmerder certains Français, les non-vaccinés… notamment. Macron s’est-il contenté d’emmerder les non-vaccinés ? Les Gilets jaunes, les énarques, les préfets, les syndicats, les retraités, les « gaulois réfractaires », « ceux qui ne sont rien » qui errent dans les gares, et bien d’autres Français rudoyés depuis l'Olympe par Jupiter sont là pour témoigner qu’il s’agit bien d’un mode de gouvernement.
Quand il dit qu’il assume, Emmanuel Macron feint de croire que c’est en aggravant son cas que l’on se dédouane.
Les psychanalystes appellent une conduite d’échec le fait de demander à redistribuer les cartes, quand on a une main gagnante. A en juger par sa dernière sortie de route dont le plus surprenant est qu'elle était inutile, si Macron a « très envie » d’un second mandat, Emmanuel, lui, ne le veut pas tant que cela.
Il y a plus de dix ans, les Français voulaient ignorer qu’ils avaient une élite, cela heurtait leur sens de l’égalité. Depuis, ils ont appris qu’ils en avaient une, qu’elle dirigeait tout sans être responsable de rien, qu'elle avait mené les finances à la dette, le pays à la ruine, la santé aux urgences, l’éducation à la rue, et l’industrie au chômage. La méritocratie à la Française est le gouvernement par une nullité crasse.
Quand l’élite se délite, le peuple se populise.
Derrière chaque redistribution, il y a un fonctionnaire qui sommeille.
Après le retour aux années trente par le renouveau des frontières et la démondialisation, c'est la valse des étiquettes, la vie chère, et l'inflation à deux chiffres, qui font que l’on se croit revenu aux années 50. L'histoire, c’est l’actualité pour les bègues.
Pourquoi continuer à dire qu’il fait beau quand il fait chaud et que le temps est mauvais quand l’hiver est froid, alors que le réchauffement du climat nous menace ?
Pourquoi le cercle est-il plus volontiers vicieux que vertueux ? Sans doute une conquête de #metoo.
La façon de mentir la plus pernicieuse est de faire parler les statistiques.
Compter tout ce que l’on voit ne garantit pas de distinguer tout ce qui compte, vieil adage de sondeur..
Les médias établis se plaignent des fake news des réseaux sociaux, qui eux-mêmes relèvent les âneries colportées par des journalistes. Une main salit l’autre.
Dans l’information officielle, la vérité comme l’indignation sont sélectives, sur l’internet c’est la sélection des vérités qui est souvent indigne.
Kärcher or not Kärcher. La France de 2005 ne voulait pas du Kärcher. Elle croyait encore au discours d’une gauche déniant l’existence même de l’insécurité et parlait d’un « sentiment d’insécurité », évidemment surestimé. La France de 2022 a pris conscience de la réalité des territoires perdus de la République. Pour elle, le Kärcher est une nécessité, sans doute insuffisante. Les médias se contentent de répéter que Sarkozy n’a pas tenu sa promesse de nettoyage, oubliant qu’ils ont été les premiers à y faire obstacle. La vraie critique que l’opinion semble faire aujourd’hui au Kärcher, c’est d’être pas asssez radical. Mais qu’aurait on dit si la candidate LR avait promis de nettoyer les banlieues au lance-flamme. La médaille d’or de l’opportunisme hypocrite revient à la société allemande Kärcher qui s’indigne d’être rentrée dans le langage commun, comme entre autres le fit en son temps l’américain Frigidaire.
Valérie Pécresse n’imprime pas. Son image est floue ou trop lisse. Pour l’emporter, elle devra souligner ses aspérités, alors que pour l’heure elle s’emploie avec succès à rassembler de réputés inconciliables, tels Alain Minc et Eric Cioti. Mais travailler les influenceurs ne se traduit pas par un effet sur les électeurs sondés.
Dans l'isoloir, les CSP+ qui sont séduits par Zemmour, ne manqueront pas de réfléchir, et de penser aux risques de l'aventure. Vers qui vont-ils se tourner ? Le Président Blabla qui les a déçus, ou Tiktok qui les agace ? Ou alors la tentation grisante de faire l'Histoire en élisant une femme à la tête de la République ? Comme il y a peu de chances qu'ils se compromettent en votant Le Pen, ce qui serait populiste, ils se retrouveront un bulletin Pécresse à la main.
Houellebecq publie un roman que l’on dit d’amour, et enfin optimiste. Le titre « Anéantir » montre que cet auteur a inventé l’optimisme noir.
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