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Le désamour, ses raisons, et la condition d’un retour d’affection

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 13 janv.
  • 6 min de lecture


A entendre le débat sur la réforme des retraites, force est de constater que les forces du désordre ont l’oreille des Français, alors que les voix de la raison sont inaudibles. Ce phénomène interpelle et mérite, pour le comprendre, d’aller au plus profond de ce mal qui désormais paralyse la France dans un concert de discorde où les partis d’opposition ou de gouvernement participent à la cacophonie.


Le talent de François Bayrou, orchestrateur de fausses notes, ne pourra que dissimuler un temps la vraie nature du mal qui rend les Français sourds au bon sens. Certes ses reculades qui sont une démission rendent la censure inutile… pour le moment, car le roi est presque nu, et bientôt il n’aura plus aucun  de ses oripeaux à abandonner pour calmer la meute.


La stratégie du chaos est attribuée sans hésitation à ceux qui aspirent à une autre République, où bien entendu ils seraient maîtres absolus du pouvoir. Hélas, elle est aussi partagée par des partis dits de gouvernement ou qui y aspirent, mais qui par leurs programmes économiques délirants conduisent le pays à la banqueroute.


L’exemple le plus intriguant est celui de l’abrogation réclamée à corps et à cris par les partis de gauche, extrême ou pas et d’extrême droite qui constituent sur ce sujet une large majorité à l’Assemblée.


Aucun individu sensé ne peut croire que les Français sont les seuls à pouvoir travailler moins quand l’Europe entière travaille plus, que l’on peut revenir à la retraite à 62 ans quand les Allemands travaillent jusqu’à 67 ans et les Italiens vont vers 70 ans.


Il est vrai que les électeurs ont tendance à se laisser séduire par  les joueurs de pipeau qui les encouragent dans leurs tentations de la facilité. Mais un tel déni de réalité ne peut pas être mis totalement sur le seul compte de l’habileté des démagogues.


Il y a des limites à la crédulité. De fait, l’adhésion populaire à la demande d’abrogation d’une réforme pourtant nécessaire et inévitable suppose que cette posture politicienne rencontre le terrain favorable d’une opinion publique que confirment les sondages.


Les Français n’étant pas stupides, certains  ont avancé qu’ils seraient d’impénitents paresseux. Bien sûr, en ce sens les références de Sandrine Rousseau au Droit à la paresse, ouvrage du gendre de Karl Marx, Paul Lafargue, pourraient l’accréditer. Dans ce sens aussi, on peut penser à la fortune de la thèse du partage du travail qui a justifié la loi sur les 35 heures, assise sur la théorie de la baisse tendancielle du temps de travail. Bien entendu, enfin, la société des loisirs est désormais une idéal social, où la vie en commun est plus rythmée par la sacralité des départs en vacances que par les fêtes religieuses.


Nul ne peut, cependant, sérieusement croire que les Français pourraient être les seuls à échapper aux réalités démographiques qui imposent de travailler plus dans la semaine et dans le cours de la vie, ne serait-ce que pour conserver le modèle social hyper-protecteur auquel ils sont attachés.


En vérité, le refus de tout effort supplémentaire par les Français est le symptôme d’un malaise plus profond, et celui-ci n’est autre que le rejet de la société telle qu’elle leur est proposée.


Ce qui est en cause dans cette attitude individualiste qui réunit une grande majorité, au-delà du clivage droite-gauche, progressistes ou conservateurs, ce n’est ni le dérèglement sociétal, à la Macron ou pis à la Trudeau qui se profile, ni le suicide assisté, ou insisté qu’on leur propose, ni le naufrage identitaire, ou la honte mémorielle, toutes ces calamités, ils auront à les affronter qu’ils soient ou non retraités.


Très précisément, sur la question des retraites, ce qui est en cause est le sentiment que les efforts demandés seraient non pas mal répartis, (pour y remédier il suffirait d’une réforme de la réforme), mais radicalement peine perdue.


Cela, on peut le comprendre, car le système tel qu’il est démontre chaque jour qu’une part croissante et déraisonnable des fruits du travail productif des Français est englouti dans les errements d’un Etat dysfonctionnel qui jette l’argent par les fenêtres.


Le régime économique de la France n’est plus celui d’un équilibre entre secteurs public et privé, mais une institution obèse et boulimique qui ne rempli plus sa fonction essentielle d’assurer des services publics de qualité. Pis, plus l’Etat exige des contributions, moins les Français en ont pour leur argent. Ce phénomène dépasse l’image du tonneau des Danaïdes, car le rendement de la dépense publique se détériore chaque jour un peu plus.


L’idée que l’Etat ne se trompe jamais, car il est dirigé par les meilleurs, est battue en brèche, et l’on va jusqu’à penser qu’il ne veut pas toujours notre bien.  L’image de l’Etat mère-nourricière est remplacée par celle  d’une marâtre captatrice.


Quand la machine étatique fonctionne à l’envers, il n’est pas surprenant que les arguments de l’intérêt collectif soient dévalorisés, chacun ne voyant plus midi qu’à sa porte. Ce qui ne surprend guère dans un pays incapable de former des coalitions.


C’est ce réflexe égocentré qui explique l’exigence d’une majorité hétéroclite de Français de toutes sensibilités de revenir sur une réforme qu’ils savent pourtant nécessaire.


Ce mouvement qui pousse les électeurs vers les extrêmes, devrait conduire l’élite d’Etat à s’interroger. Alors surtout que dans le même temps, il existe une très large volonté populaire pour exiger une réduction des dépenses publiques.


Les maîtres de Bercy font mine de croire qu’il leur suffirait de simuler une réduction du déficit, en augmentant les prélèvements obligatoires, pour que le peuple soit contenté. Telle est la martingale qu’ils ont proposé à Michel Barnier. Ce dernier n’a même pas pu présenter son projet de Budget, il a chuté sur celui de la Sécurité sociale.


Nos Paganini de la taxation, qui n’ont pas vu venir le dérapage des finances publiques de 2024,  appellent « dépenses fiscales », les réductions de prélèvements. Autrement dit, chez ces gens là, faire des économies, c’est augmenter les impôts.


Les Français, qui sont tous des contributeurs, ne serait-ce que par la TVA, se moquent du déficit et de l’impasse budgétaire, ce sont pour eux des affaires de comptables experts en artifices. Ce qui les décourage et leur insupporte, c’est qu’il n’est rien fait au chapitre des vraies dépenses. Celles pour lesquelles on les saigne aux quatre veines.


Ce que le sens commun attend des Financiers publics, c’est d’une part de la rigueur dans la gestion des deniers et de l’autre de la pertinence dans la redistribution, ce « pognon de dingue » qui au lieu de supprimer la misère, vide les caisses de l’Etat, plombe l’activité, et aggrave la pauvreté.   


Ceux qui sont en charge de gérer l’emploi des fonds publics, ne sont pas tant les politiques qui votent des lois toujours plus ou moins justifiées, mais l’Administration dont la philosophie a été résumée par François Hollande incitant à profiter de distribution d’outils informatiques dans une école s’écriait : « ça ne coûte rien, c’est l’Etat qui paye ». Tout est dit. Le respect de l’argent public est perdu.


Les Français sont trop pacifiques pour remettre en cause leur consentement à l’impôt, encore que les Gilets Jaunes ont montré qu’ils pouvaient le faire bruyamment, mais ils réagissent en refusant de travailler plus. En un sens, l’impossibilité de faire voter les Budgets publics pour 2025, n’est que  la traduction de cette résistance passive.


Si aujourd’hui, les forces du désordre se coagulent à l’Assemblée, c’est qu’elles traduisent le raz-le-bol économique d’un pays qui ne veut plus du gouvernement des gaspilleurs et des profiteurs. Les Français ont compris que l’argent de l’Etat, c’est le leur, et qu’il est en de mauvaises mains.


Dans l’affaire des retraites, ce qui est en cause est la part insupportable confisquée par l’Etat dans le produit national brut. Le reste à vivre laissé par lui à la population ne vaut pas la peine que l’on s’use plus ou se tue au travail.


Bien entendu, l’élite d’Etat tente de détourner l’attention sur les riches, qui seraient inutiles et que l’on pourrait mettre à contribution pour plus de « justice fiscale ». Mais, de cette rengaine, personne n’est dupe. Ce qui est défaillant, c’est la gestion des deniers publics.


Il n’est que temps d’acter le désamour du peuple français pour son élite d’Etat, politiques et haute fonction publique confondus.


Le seul gouvernement qui pourrait les réconcilier avec la puissance publique serait celui qui fera que le poids de celle-ci diminue drastiquement. Pour ce retour d’affection, nul besoin de consulter un marabout africain, une seule voie : réduire le taux de prélèvements obligatoires* de 48 % du PIB à 41,9% qui est la moyenne de la zone euro. Restituer à l’économie productive 156 milliards d’euros par ans, là est le salut. Tout le reste, et en particulier la polarisation sur le déficit public, ne sera que fariboles, trompe l’œil et poudre de perlimpinpin.


***


*Les prélèvements obligatoires correspondent à l’ensemble des « versements effectifs opérés par tous les agents économiques au secteur des administrations publiques dès lors que ces versements résultent, non d’une décision de l’agent économique qui les acquitte, mais d’un processus collectif et que ces versements sont sans contrepartie directe »





 
 
 

1 Comment


jeanpaulluneray
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