Le grand retour des sots ? Ou bien...
- André Touboul
- 28 déc. 2021
- 4 min de lecture

« L’inclusif ! Mais ne serait-ce pas qu’ils seraient en train de nous les briser grave ces Trissotin·e·s ? » demande Sylvain Tesson, magicien du verbe. On aura reconnu ici les “icelles et iceulx” qui pratiquent la langue inclusive, que l’on peut définir comme la seule façon d’enlaidir une chose en la féminisant..
On se prend à penser que l’auteur de La panthère des neiges célèbre là le grand retour des sots. Ces esprits simplets dont Trissotin est l’archétype, ont eu leur siècle de gloire au temps de Molière. Leur règne a perduré jusqu’à Victor Hugo qui est sans doute le dernier auteur à aphoriser sur les sots. ”Un sot est un imbécile dont on voit l’orgueil à travers les trous de son intelligence”, érivait-il. A de nombreux indices qui montrent que la sottise est à nouveau parmi nous, on pourrait croire qu’ils sont de retour.
Mais la référence au grand siècle et aux auteurs immenses qui évoque la haute époque du sot, pour être élégante, n’est pas conforme à la réalité. De fait, elle passe à côté de la qualité première des imbéciles de notre temps, laquelle est la malfaisance qui est le privilège des cons.
Les cons sont parmi nous. A ce point que l’hebdomadaire Marianne en a fait sa couverture de la semaine. On pourra détester la manière dont le périodique désigne nommément les cons, ou ceux qu'il estime tels. Et comme pour le fameux mur des cons on se demande qui est le plus con dans l'affaire.
Quand ont parle des cons, on pense à Brassens qui les a chantés, mais surtout à Michel Audiard. Si Audiard a tant de succès aujourd’hui et si ses dialogues sont devenus iconiques jusqu'à la Présidence de la République où l'on s'en vante, c’est qu’il s'est voulu le chantre de la connerie. Il fut le parolier des cons qu'il reconnaissait à ce qu’ils osent tout, sans doute en écho à Hugo qui disait que “la confiance en soi fait le sot”.
Ce qui distingue les cons des sots, c’est que ces derniers ne nuisent qu’à eux-mêmes, alors que les cons sont puissamment toxiques. Par nature, le con est malveillant, et sans effort, car il ne se fatigue jamais, il réussit ce tour de force de transformer les meilleures causes en détestables croisades.
Le con a un besoin viscéral de détester, le con est haïssant. Le con définitif atteint au sublime, quand il en vient à se flageller lui-même. L’islamo-gauchiste en est l’exemple emblématique. Sous-produit de la pensée universaliste européenne, le con n’a de cesse que de lui faire injure en l’accusant de tous les phobismes possibles. Ainsi l’on peut dire qu’il resplendit.
Le con est d’autant plus favorable à “canceller” la culture occidentale au nom de principes humanistes qu’elle est la seule à avoir institués, qu’il n’en a personnellement aucune, ou si peu qu’il n’est pas exagéré de dire qu’il voyage léger.
Le con reproche à la langue française de privilégier le masculin par tyrannie patriarcale, alors qu’une table et un tabouret en témoignent, le genre est distribué au gré de l’euphonie, sans arrière-pensée sexuée.
On aurait pu croire que le con, triomphant au siècle dernier, céderait le pas à l’idiot. Il n’en a rien été, car à la différence de l’idiot rural qui est indifférent à son environnement et se complait à faire des ronds dans l’eau dans son village, le con urbain est militant. Il est woke, une attitude que l’on pourrait appeler vigilante, et il se regroupe en une milice de la pensée correcte.
Vigilant, le con est aussi rusé, il sait exploiter le penchant pervers des mea-culpistes qui, vieil héritage chrétien, ne se sentent confortables que dans la repentance. Le con est obstiné. Quand on apprend que les Talibans, purs produits de la civilisation afghane ont décidé que pour effectuer des voyages longue distance les femmes devront être accompagnées d‘un homme de leur famille, le con n’en démord pas, il professe que toutes les civilisations se valent. Le con en est convaincu, car il a entendu dire que les civilisations étaient mortelles, mais il est bien en peine d‘en citer une seule qui soit plus universaliste, féministe et tolérante que la notre. Il faut dire à sa décharge qu’il confond civilisation et folklore.
On aurait tort de s'accoutumer au militantisme des cons qui veulent imposer leur courtes vues par l'intimidation. Quand un chiot pisse dans le salon, il faut lui frotter le museau dedans pour faire son éducation. De même, il ne faut pas hésiter à mettre les “wokistes” face à leurs contradictions d’anti-racistes/racisants et de féministes/ pro-islamistes. Aurait-on dérapé en “comparant” des humains à des chiens, ce qui serait de la patte d’un con chimiquement pur ? Pas le moins du monde, car le chien est le meilleur ami de l’homme ; c’est là une marque de bienveillance et d’espoir en ce que la connerie en question n’est pas incurable. Et, soyons précis, traiter quelqu’un de con n’est pas une insulte, mais un diagnostic.
En paraphrasant la une de Charlie Hebdo sur Mahomet, on pourrait déplorer aujourd’hui : c’est dur d’être gouvernés par des cons ! Cela résumerait la consternation qui saisit quand on voit que la ministre de l’enseignement supérieur se dégonfle devant les Talibans de Sciences Po Grenoble. On n'ira pas plus loin dans la dénonciation des personnes, car ce serait verser dans le travers que l'on reproche aux «mauvais.es con.ne.s » (sic) qui s'adonnent à la pratique de la liste noire, veulent rééduquer les gens, et réécrire les livres quand ils ne les brûlent pas.
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