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Macron, Actor studio ou Christophe Colomb ?



On appelle parfois cela l’usure du pouvoir. On avance souvent comme explication l’isolement où se trouve par construction un chef de l’Etat monarchique, élu au suffrage universel ou s’étant emparé du pouvoir par la force.

Le fait de décider en dernier ressort fait, dit-on aussi, de moins en moins supporter les critiques et la contradiction devient inacceptable.

La réalité est là, incontournable, l’exercice du pouvoir rend sot.

Lord Acton disait au 19ème siècle  : « le pouvoir corrompt et le pouvoir absolu corrompt absolument ». Cette corruption n’était pas celle que l’on entend aujourd’hui, celle qui concerne le fait de succomber à la tentation monétaire. C’est l’intelligence que le pouvoir corrode.


On avance, ici ou là, l’idée que le fait de ne pas avoir à se soucier d’une réélection devrait libérer le despote éclairé, désormais en mesure de mettre en oeuvre les mesures difficiles mais nécessaires. Ad augusta per angusta, vers la sagesse par des voies étroites, écrit Victor Hugo dans Hernani, mais cela est de la littérature, le monde rêvé du plus grand poète français (hélas).


Dans la vie réelle, c’est le contraire qui se produit. Les derniers mandats, pour cause constitutionnelle ou d’âge avancé, sont toujours des naufrages. Mitterrand, grand malade, ou Chirac, roi fainéant en sont les exemples.


Les autocrates aussi deviennent stupides. Les plus habiles deviennent maladroits, les plus attentifs sont sourds. Ils s’embarquent dans des aventures inutiles, vouées à l’échec et ils s’y entêtent, tel Poutine en Ukraine. Ils donnent libre cours à leur cruauté, leur sadisme, tous leurs défauts humains qu’ils prennent pour des traits de génie, comme Staline à une autre époque.


L’effet de cour, la toxicité des flatteurs participe à l’isolement du monarque, mais il n’est pas suffisant pour l’expliquer. Le vice est inhérent à la position de pouvoir. Toute décision, au niveau de l’Etat, est un choix entre de mauvaises solutions. Il en résulte une hubris du chef qui le porte à se croire d’une nature supérieure.    


Depuis mai 2022, Emmanuel Macron II, lui-même surpris d’être sur la scène, donne le sentiment de jouer des rôles, sans queue ni tête que l’on jurerait écrits par Pirandello et Ionesco réunis.

A chacun sa vérité où rien ne vaut, car tout se vaut, l’important semble être de faire bonne impression, la partition présidentielle devient alors une parodie d‘elle-même, et l’on s’attend à entendre  sonner les dix-sept coups de la pendule de l’Elysée quand il se lance dans un panégyrique vibrant des gloires de l’acteur Depardieu qui loin de prévenir un hallali médiatique, certes détestable, ne  justifiait pas un homage officiel aussi appuyé. Le comédien n’a, en effet, pas l’innocence pure d’un Roger Salengro, poussé au suicide par une odieuse campagne de calomnies,  que les Français ont reconnue en attribuant son nom à un très grand nombre de rues. On a les idoles que l’on peut, celles de notre Président est un histrion.


Evidement, l’on pense à son expérience et son attachement affectif à sa professeur de théâtre. Les méchantes langues parlent d’un acteur rentré, contrarié ou raté. C’est, en ce qui le concerne, plutôt l’aspect caméléon de l’acteur qui n’est rien par lui-même et se joue dans un personnage de composition sans cesse changeant au grè des circonstances et des interlocuteurs. On pense aussi au transformiste Frégoli pour illustrer ses changements de cap. On pourrait concevoir que notre Président de la République, soit un acteur de sa propre fonction, s’il était crédible dans sa performance. Mais manifestement les cours de Mme Trogneux  ne valaient pas ceux de MM. Kazan et Strasberg, créateurs de la méthode de l’Actor studio. Dans les prestations d’Emmanuel Macron, il manque de la conviction. Pour un peu, l’on dirait qu’il joue à jouer.


Le fond de l’affaire est sans doute ailleurs. Sur des bases fausses, l’intelligence nuit, elle autorise des contorsions absurdes et donne l’illusion de faire du « en même temps » quand on se contredit. On dit parfois des avocats qu’ils soutiennent un thèse et son inverse, sans états d’âmes ; ceux qui donnent ce sentiments sont de très mauvais défenseurs, car ils ne sont pas crédibles.


La question est de savoir si l’intéressé a ou non conscience de ce hiatus. La réponse est oui, mais que c’est pour lui négligeable.


La malédiction du pouvoir est qu’il rend sot, non pas par défaut de compréhension, mais par une surestimation de soi qui donne le sentiment que l’on peut dominer les événements du seul fait de sa volonté. Le tyran ose tout. Le monarque républicain est plus modeste, mais le schéma mental est identique. Il se résume ainsi :  la volonté domine les faits. Du temps de la splendeur des énarques leur promesse était de tout régler par une politique volontariste.


Ainsi Macron, marqué par le pli de sa formation, annonce de vastes actions sans en prendre les moyens, car il néglige le poids du réel. Il croit que sa seule volonté bougera le monde.


Ayant compris que la France issue du programme du Conseil National de la Résistance, le CNR, est vouée au déclin, sinon à un effondrement de type de celui de la bureaucratie soviétique, il a mis en place un nouveau CNR, le Conseil National de la Refondation. Mais là où il aurait fallu convoquer des Etats Généraux  de la Nation française, avec la participation du Parlement en son entier et du Conseil économique, social et environnemental, plus, éventuellement, des citoyens élus à cet effet, il a réuni quelques prétendus experts qui n’ont accouché de rien. On en reste aux velléités. Ainsi ses réformes claironnées comme des révolutions ont toujours été minimalistes. Son livre de la Campagne de 2017 était intitulé Révolution, une fois élu, il ne parla plus que de « Transformation », et désormais il promet des « actions ».


Tels les lutteurs de foire qui soulèvent des poids factices avec d’énormes efforts apparents, il a annoncé des « initiatives d’ampleur » pour la rentrée 2023. Mais l’on a rien vu, si ce n’est une loi immigration que les cris d’orfraie de la Gauche ne parviennent pas à rendre plausible.


A l’international, son cap est celui d’une girouette. Un jour il câline Poutine « pour ne pas l’humilier », un autre il est le soutien de l’Ukraine « jusqu’à la victoire ».  Un matin, il veut réunir une coalition internationale, comme pour l’Etat Islamique, afin de détruire le Hamas, le soir, il exige d’arrêter les combats contre l’organisation terroriste.


Ces revirements ont des conséquences sur la société française. Nul ne sait plus s’il faut faire des efforts pour sauver l’Ukraine ou pas. Quand à l’harmonie entre les religions, elle est, en France, de plus en plus compromise, chacun se considérant comme légitime à détester les autres.


La logique intellectuelle de Macron est la godille. Il va de J-M. Blanquer à Gabriel Attal en passant par Pap Ndiaye, et l’Education Nationale ne sait plus à quel saint se vouer. Tous les conducteurs le savent, accélérer en freinant, c’est l’embardée assurée.


A la Santé se succèdent les ministres sans ligne directrice.


Churchill disait de Christophe Colomb qu’il fut le premier des socialistes, parti sans savoir où il allait, il est arrivé autre part, aux frais du contribuable. A force de divaguer, Emmanuel Macron trouvera-t-il le Monde nouveau qu’il promettait ? Seuls les optimistes pathologiques y croient encore.

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