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Macron, la démission

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 15 oct. 2022
  • 4 min de lecture

On parle beaucoup ces temps derniers de l’éventualité d’une dissolution de l’Assemblée Nationale, il semble plutôt que l’on assisterait à une dilution du Président de la République.

Quand l’Assemblée bouillonne et démontre sa vitalité, parfois même à l’excès, c’est le Président qui s‘évapore dans ce qui paraît être le syndrome du second mandat. Le mal avait frappé Jacques Chirac, mais aussi Mitterrand et De Gaulle.

Alors qu‘une réélection devrait conforter le Président dans un pouvoir renforcé propice à de robustes réformes, c’est à une sorte de léthargie que l’on a à chaque fois assisté. Réélu fin 1965, Charles De Gaulle a été bousculé en 1968 et poussé dehors l’année suivante. Il aurait pu se maintenir après l’échec du référendum sur la régionalisation, mais conscient de ce qu’il n’avait plus rien à faire de nécessaire, il a jeté l’éponge. Quelques témoignages rapportent que celui que l’on voyait comme un modèle de solidité, était en réalité, dès avant 68, sujet à une dépression qui l’avait fragilisé.


François Mitterrand a connu un second mandat aussi inattendu que calamiteux. Sa santé explique sans doute en partie son inertie, mais comme Jacques Chirac après lui et dans la même situation, il s’ennuyait à l’Elysée.

Emmanuel Macron a pour lui la jeunesse et apparemment une santé sans faille. Néanmoins, le fait est là, il se désintéresse des Français, et la France éternelle n’a jamais été pour lui une préoccupation essentielle. .


On avait déjà remarqué lors du scrutin présidentiel l’absence de second souffle du candidat Macron. Sa promesse saillante étant de repousser l’âge de la retraite à 65 ans, elle n’avait pas de quoi faire rêver. Cette audace n’avait, au demeurant, aucune portée tant il était évident que dans la conjoncture inquiète créée par la guerre en Ukraine, il était hors de question que les Français souhaitent changer de le conducteur du char de l’Etat. De fait, les nouveaux venus qui avaient un temps attiré l’attention du public (Zemmour, Pécresse) se sont effondrés au bénéfice des anciens (Le Pen, Mélenchon), et dans une telle configuration la reconduction du sortant n’était qu’une formalité.


Le danger constitué par une armée russe, dont la menace était plus fantasmée que réelle, s’estompant avec ses déboires en Ukraine, on pouvait espérer que notre Président condescendrait à s’occuper un peu des Français.


Il n’en a rien été. Réformateur en paroles il s’est défaussé sur le gouvernement Borne pour faire accepter un ajustement minimal du calcul des retraites. Rien à cela de surprenant, il a toujours été plus diseur que faiseur.


Sur les questions d’insécurité du quotidien qui angoissent les Français, on attend en vain quelque lumière que ce soit sur la manière dont le Président entend y porter remède. Ces affaires, qui pourtant affectent les profondeurs de la société, sont à ses yeux subalternes ; il les délègue à Darmanin, Ministre de la police, alors que le malaise englobe la Justice, et même réside dans un défaut de politique tendant à restaurer une cohésion sociale qui vacille. Sur la menace de l’islamisme politique, toujours plus virulent, rien. Sur les extrémismes populistes aucune alternative.

Sa réponse à la précarité énergétique et économique parait limitée à des pansements d’urgence sans perspective de long terme.


Quant à une vision d’avenir sur l’identité française, pourtant en crise existentielle, il n’en a guère.

Ses choix ministériels démontrent, en outre, une totale inattention sinon indifférence aux perceptions de l’opinion. Pap N’Diaye, est sans doute un universitaire brillant, mais son profil woke et sa double nationalité ne le désignaient pas pour assumer la charge de l’Education Nationale qui est au cœur de l’identité française Eric Dupont-Moretti est, bien sûr, un grand avocat, mais son incapacité à dialoguer avec les Magistrats, aurait dû dissuader de le maintenir à un poste aussi sensible.

On ne parlera pas de la Ministre de la culture, dont on peut douter qu’elle existe. Mais le plus singulier est la désignation d’Olivier Véran comme porte parole du Gouvernement. Le lourd passif de menteur invétéré et même avoué sur les masques lors du début de la pandémie de la covid, aurait dû le disqualifier. Bien entendu, l’intéressé a récidivé en niant, contre l’évidence, la pénurie de carburant.

Par la vacuité de son discours programmatique, la perte de crédibilité dans les annonces de son Gouvernement, par ses coquetteries de prima doña fébrile d’exister sur la scène internationale, son absence de maitrise de son propre parti et de sa majorité qui non contente d’être relative se délite dans ses alliances où les arrière-pensées présidentielles dominent, Emmanuel Macron semble avoir perdu la main. Pis, il a lassé et cessé d’intéresser les Français.

La vraie question politique qui se pose aujourd’hui est celle de savoir si la France peut se passer de Président pendant encore quatre ans.


Le régime de la Vème République, à l’origine parlementaire, puis depuis 1962 équilibré par l’élection du Président au suffrage universel, est devenu présidentiel par la réforme du quinquennat, et un certain nombre de dispositions sur le non-cumul des mandats dont l’effet a été d’affaiblir les implantations locales. Les partis de gauche et de droite en ont été victimes et le personnel politique amoindri.


Cela implique que toute la politique du pays soit désormais impulsée par les conceptions du Président. Jacques Chirac, dont il ne reste de positif que les bons mots, a démontré la toxicité du Roi fainéant dans le système du quinquennat. A l’inverse d’une charge qui est de plus en plus capitale, Emmanuel Macron est un monarque qui devient absolument absent.


« Malheur à la ville dont le prince est un enfant », dit l’Ecclésiaste. De fait, le génie précoce d’Emmanuel Macron semble avoir exprimé tout son jus. Depuis son ouvrage Révolution, jusqu’à son ébauche de parti Renaissance dont le nom ressemble à un voeux vœux pieu, le parcours est celui d’une ambition de moins en moins élevée.

Le pays ne peut pas, sans grand dommage, endurer cette situation qu’il faut bien qualifier de démissionnaire.


Hélas, le paysage politique français n’offre aucune personnalité alternative, l’ensemble de la classe politique paraissant se satisfaire de cette situation d’apesanteur.

Alors la rue ? Le désordre n’apportera aucune réponse. Ceux, comme Mélenchon, qui appellent au déferlement, et font semblant d’espérer un Grand Soir, savent bien que, de l’émeute, ne sort renforcée que l’extrême droite.

Le pire des scénarios pour Emmanuel Macron serait qu’une dissolution ramène une Assemblée encore plus ingouvernable. Il n’aurait alors plus qu’une seule solution : démissionner. Mais n’est-ce pas ce qu’il a déjà commencé à faire ? Et probablement, la France y aurait tout avantage.


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