Que les ignares gardent les clés du Panthéon
- André Touboul
- 17 janv. 2022
- 2 min de lecture

L’Elysée refuse le Panthéon à Molière, au motif qu’il serait d’Ancien régime et donc pas des Lumières. De toute évidence, il y a plus de lumière chez Molière que dans la tête de certains courtisans. On craint d'y voir une manifestation uniwoke de la mentalité déconstructrice de la coterie qui sur l'Olympe dirige le pays,. Cette pseudo-élite se trouve de moins en moins en accord avec ce qu’il a été, ce qu’il est, et ce qu’il ne veut surtout pas être, c’est-à-dire une nation de Béotiens. Le Président, qui a été recalé à Normale Sup, mais se veut un esprit éclairé, aurait-il oublié que le Français est la langue de Molière, comme l'Anglais est celle de Shakespeare. Emmanuel Macron, se rêvant emmerdeur, a renoncé à être le candidat du raisonnable, il devient en rejetant Molière celui de la déraison.
On s'interroge sur ce qui, au delà de la sottise du team Macron, motiverait un tel rejet de Jean-Baptiste Poquelin. Molière aurait-il été islamophobe ? Son « pendard de Turc », des Fourberies de Scapin, le rendrait-il suspect ? Son “Mamamouchi”, du Bourgeois Gentilhomme, le rendrait-il xénophobe ? Aurait-il enfreint les dogmes du féminisme en se moquant des Précieuses ridicules ? Son Malade imaginaire en ferait-il un antivax ?
Rien de tout cela ne tient. Alors on se demande s’il faut voir dans l’attitude élyséenne une suspicion : Molière n’aurait pas été l’auteur de ses pièces, lesquelles auraient été écrites par Corneille.
Molière, un imposteur ? Le crédit qu’il faut accorder à cette fable, tirée du même tonneau que celui où l’on a puisé que Shakespeare n’était pas l’auteur des pièces de Shakespeare, faute d’avoir trouvé des manuscrits autographes de l’un ou de l’autre, est fort mince. En effet de ces textes, il n’en est aucun, de sorte que l’on doit se persuader qu’ils n’ont, à ce compte là, été écrits par personne.
Quant aux coïncidences de style entre Molière et Corneille, il faut n’avoir jamais rien écrit pour ignorer que la plume s’inspire de l’air du temps et des tournures qu’il véhicule, et ne pas admettre que Molière avait sans doute assez de talent pour écrire comme Corneille, aussi bien, ou en s'inspirant de son style.
Décidément, que les ignares gardent les clés du Panthéon, il y repose bien assez d’illustres inconnus auxquels la Patrie ne se souvient plus pourquoi elle devrait leur être reconnaissante. Sans vouloir leur faire injure, qui se souvient de Jean-Ignace Jacqueminot, Jean-Marie-Pierre Le Paige, Joseph-Marie Vien, Charles-Pierre Claret, Claude-Louis Petiet, ou Jean-Baptiste Papin, (sans rapport avec Denis), etc….etc…
Au fond la seule raison valable de ne pas faire entrer Molière au Panthéon serait que ce monument n'est pas à la hauteur de la reconnaissance que les Français lui doivent.
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