Rouge 2021, l’été de la honte
- André Touboul
- 19 août 2021
- 5 min de lecture

Le mois d'août est celui où chaque année se produit une catastrophe. En 2021, il y en aura eu plusieurs. Rouge est la couleur de l’été mais aussi celle qui nous monte au front quand on éprouve de la honte. Dans ce triste moment se mêlent les motifs de se sentir salis par la désertion devant les Talibans et le coronavirus deux ennemis qui ne font pas de quartier.
La honte que l'on éprouve aujourd’hui est celle des Etats-Unis qui, après leur déroute au Viêt-Nam, où ils avaient cru pouvoir faire mieux que les Français, doivent quitter l’Afghanistan, la queue entre les jambes.
Deux décennies de guerre, mille milliards de dollars dépensés, selon Joe Biden qui évoque des dizaines de milliers de morts américains… tout cela pour rien. L'Afghanistan, ce pays avait été le cimetière de l’armée de l’URSS, comme Dien Bien Phu fut celui de l'armée coloniale française. Dans les deux cas, Viêt-Nam et Afghanistan, l’Oncle Sam n’avait pas été pour rien dans la déroute de ses prédécesseurs. On mesure une nouvelle fois que le dollar perd toujours face aux idéologies, hier communiste, aujourd'hui islamiste. La lutte est dissymétrique : la pureté du dogme, contre l'impureté de l'argent.
Le narco-gouvernement afghan ne méritait pas qu’on le défende, mais il est pire de laisser se faire massacrer ceux qui vous ont aidé et fait confiance. Cette faute morale est une tache indélébile. Les erreurs américaines en Afghanistan seront révélées par les historiens, mais l’on sait déjà que les USA ont péché par une ignorance crasse des réalités du peuple afghan. Il semble qu’ils aient financé indirectement les Talibans en s’appuyant sur des services secrets qui jouaient le double jeu.
On a honte en pensant à ces Afghans qui ont cru en l’Amérique. Qui pourra demain avoir foi en cette puissance qui abandonne ses alliés ? Les Taïwanais, mais aussi les Israéliens et les Allemands devraient y réfléchir. Décidément, l’ami américain n’est plus ce qu’il a été. Il serait temps que les Européens se prennent en main et songent à consacrer plus efforts à leur propre défense.
On se demande si cette déroute n’est pas aussi celle des démocraties qui ont crû dans les printemps arabes et ont en Irak, en Syrie et au Maghreb poussé à la chute des régimes corrompus et brutaux sans que le chaos et les Islamistes ne les remplacent. Cette victoire des fous de Dieu aura certainement des retombées chez nous.
La débâcle de Kaboul ne met pas fin à la guerre, celle-ci continuera : l’Islam contre l’Occident. Il y aura des épisodes en Europe, des tensions dont les populations musulmanes qui y vivent risquent de pâtir, étant des enjeux de la poursuite d’un conflit sans fin.
On ressent aussi de la honte, en tant que Français, en apprenant l’assassinat du père Olivier Maire. Un saint homme, victime qui aurait pu être épargnée si nos magistrats et nos psychiatres avaient fait leur travail. Mais, également, il est honteux que les bons esprits présentent leurs condoléances à la communauté catholique, comme si les autres, ceux de la communauté des Français et des humains n’étaient pas meurtris. Ces jocrisses sont les mêmes qui prétendent lutter contre le communautarisme et, sans même s’en rendre compte, s’y soumettent.
La honte encore nous saisit de voir les anciens du Front National, mal blanchis, joindre leurs voix aux anti-vax dont les slogans antisémites ne sont pas anecdotiques, mais consubstantiels à leur délire. Et comment ne pas éprouver un malaise en constatant que certains LR semblent hésiter à choisir leur camp ? Dans ce marécage, les socialistes sauvent l’honneur en se prononçant pour la vaccination obligatoire.
Le rue est rarement le lieu où s’exprime la sagesse, mais cet été elle se surpasse. Car c’est aussi une honte que la soi-disant liberté individuelle que l’on y revendique. Sous couvert d’arguments complotistes, ce n’est rien d’autre qu’une manifestation de planqués qui prétendent attendre que les autres prennent des risques qu’ils ne veulent pas prendre et leur offrent du recul. Si tout le monde réagissait comme eux, il n’y aurait jamais de vaccin possible. Qualifier ces égoïstes de « planqués » n’est pas excessif, quand ils braillent leur trouille, et attendent que l’immunité collective passe par les autres, ils désertent le champ de bataille. Ils en sont fiers, cela ne les rend pas respectables. Victor Hugo les aurait qualifiés de populace. Les médias leur prodiguent mille égards. A force de ne pas vouloir juger les comportements de rue, qu’ils prennent pour la quintessence de la démocratie, les médias s’en rendent complices. Qui dira à ces non-vaccinés qu'ils se comportent comme des tueurs en véhiculant la mort ? Qui leur parlera de la mise en danger de la vie d'autrui ?
Quand aux "puristes" qui, sans être hostiles au vaccin, mettent leur liberté au dessus de tout pour refuser le passe-sanitaire, ils ne s’insurgent pas contre l’obligation de produire leur permis de conduire quand ils sont au volant, ou de se soumettre à un contrôle d’alcoolémie. Le fond de leur prétention concernant la santé est qu’ils croient qu'à cet égard et à la différence de la violence routière, ils ne courent personnellement aucun risque. Ils offrent un visage bien laid de leur France, peut-être libre mais qui est bien loin d’être fraternelle.
La honte enfin nous étreint en constatant la jobardise des pays développés devant l’arrogance chinoise. Comment pouvons nous continuer à commercer avec cet Etat qui détruit notre santé et nos économies, et refuse les investigations de l’OMS, tout en se glorifiant de son régime totalitaire qui lui permet d’échapper aux conséquences de la pandémie ?
Sans prétendre qu’il y ait une action délibérée de la part de la Chine pour hâter sa prochaine domination mondiale, les faits sont là. C’est l’Occident qui fait les frais de la pandémie covid. Les Américains se satisfont de rodomontades en parlant de guerre économique, mais continuent à dépendre de l’atelier chinois. Les Européens devraient ouvrir les yeux, l’âge de l’innocence de la mondialisation heureuse tous azimuts est bel et bien fini. On ne pourra bien longtemps maintenir la fiction d’une Chine fréquentable quand elle déclare vouloir établir des « relations amicales » avec les Talibans. La mondialisation suppose un minimum de valeurs partagées, les étudiants islamistes de Kaboul nous auront au moins rendu ce service de montrer les limites des relations entre les démocraties et les régimes totalitaires.
Emmanuel Macron ne pouvait pas faire moins que de s’exprimer sur les événements en Afghanistan. Sur le rapatriement des Français et de ceux qui en ont été proches, il a fait le service minimum. Le point crucial du discours était sa prise de position sur les prévisibles flux migratoires. Il s’est montré conscient du malheur qui s’abat sur les Afghans et surtout les femmes afghanes, mais il n’est pas tombé dans le piège de la compassion à bon marché. Ouvrir les bras pour ensuite constater qu’il est impossible d’accueillir un exode massif, aurait été susciter de faux espoirs. A cette occasion, il s’est comporté en chef d’Etat, sachant qu’il serait, bien entendu, la cible d’un procès en inhumanité.
On dit que les Talibans ont changé, il est probable que ce soit en pire. Les déclarations de Le Drian, notre ministre des affaires étrangères, sur le devoir des Talibans de respecter les droits des femmes et de ne pas devenir un sanctuaire du terrorisme, sonnent comme des incantations auxquelles lui-même ne croit pas.
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