Touchez pas au grisbi !
- André Touboul
- 25 janv.
- 3 min de lecture

Plus encore que pour l’amour, il existe une quantité de mots pour parler de l’argent. Le grisbi est celui argotique des truands entre eux. Avec Donald Trump, c’est le temps du pognon qui voudrait supplanter le fracas des armes. Il ne s’agit pas du retour de l’argent qui coulait à flot au gré du doux commerce de la mondialisation, c’est à l’inverse l’argent brutal des tontons flingueurs dont la privation prend à la gorge.
L’inspecteur Harry à la Maison Blanche, laisse les Européens éberlués. Trump ne menace pas avec un colt, mais il parle cash et de cash, sans prendre de gants. C’est la version US de « touchez-pas au grisbi ».
La dénonciation du green deal, un scandale, ou la fin d’une naïveté ? La jobardise des médias européens anti-Trump va jusqu’à ériger la Chine en salvatrice de la transition écologiste. Certes l’Empire du milieu nous inonde de ses panneaux solaires et bientôt ses véhicules électriques, mais il produit à lui seul plus de 30% des émissions mondiales de gaz carbonique. Les réductions d’émissions de CO2 sont ici, chez nous, au prix de la rentabilité des entreprises comme le reconnaît Éric Lombard, notre ministre des finances, et les profits industriels sont là-bas, en Chine. La Planète n’y gagne rien, et nous y perdons tout. Au total, garder l’industrie chez soi en prenant quelques précautions serait bien moins polluant. A cet égard, Trump sort d’un engrenage fatal.
Le Président américain dispose de la première armée du monde, on ne peut lui reprocher de privilégier, dans son arsenal, une arme appelée « dollar ».
Quand Trump annonce qu’il va “forer, forer, forer !”, il s’adresse non pas tant à son économie qui dispose déjà d’une énergie très bon marché en suffisance, mais à Poutine, que le gaz et le pétrole américains vont ruiner durablement. Pour appuyer cette menace Trump invite les producteurs comme l’Arabie saoudite à peser dès maintenant sur les prix en exportant plus.
“Make it my day !” Menace Clint Eastwood, un magnum à la main, Trump agite de la même façon des droits de douane énormes qu’il peut étendre dans le monde à plusieurs clients de la Russie. Et cela marche ! Poutine, Pinocchio travesti en Fantômas, répond en vantant la bonne santé de l’économie russe (i.e. même pas mal !), et réplique que la baisse du prix du pétrole serait mauvaise pour Washington aussi (i.e. t’es pas cap !).
Quand Trump propose de dénucléariser, Poutine répond : chiche ! Mais ce n’est qu’une façon pour l’Américain de dire au Russe qu’il n’aura pas les moyens d’entretenir son parc atomique, lui rappelant comment Reagan a fait tomber l’URSS.
Le Terrien lambda, qui croyait être gouverné par des êtres supérieurs et raffinés, en a froid dans le dos. Mais est-ce si grave ? Jusqu’ici les chefs d’Etat prenaient des mines compassées et s’efforçaient de jouer poliment les responsables en tenue de soirée. Dans le monde d’aujourd’hui les dirigeants n’ont plus d’éducation, mais leur débraillé n’est pas hypocrite. Ils jouent cartes sur table.
La monde du grisbi trumpien est brutal, mais il est moins tragique que le dialogue des missiles entre Biden et Poutine.
Les Européens auraient tort de croire pour autant que leur réarmement ne serait plus une nécessité. Il fait partie du bras de fer financier avec Moscou. Mais au-delà de la négociation d’arrêt immédiat des hostilités, la question de l’équilibre à terme du continent ne permet pas à l’Europe d’y tenir son rôle avec des pistolets à bouchon.
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